34 LA QUESTION TURQUE latrines; c’est par bandes que les garçonnets passent les nuits dans les bains turcs ; c’est en masse que les veuves conduisent leurs enfants dans les maisons louches de Galata et de Péra. Un exemple vivant entre mille, dont nous partageons la responsabilité. M. E... me signale le cas de quatre orphelins de père et de mère, dont l’aînée, 17 ans, a mai tourné. Il s’agit de sauver les trois petits; mais ils sont dans une maison publique. Une entrée sinistre, un escalier sombre jusqu’au troisième étage, où une porte s’ouvre sur une chambre de pauvre apparence. Trois enfants de douze, neuf et six ans accroupis par terre autour d’un foyer sans feu. Un grand lit enrubanné occupe la moitié du taudis ; c’est là que la péche-l'esse se sacrifie pour les petits. « Il fait trop froid, « dit-elle, pour les mettre dehors, et, si je n’ai pas de « client, ils n’ont pas à manger. » En quelques années, l’alcoolisme a fait, parmi la population indigène, des progrès dont j’ai pu constater l’effrayant résultat en visitant les hôpitaux et les asiles d’aliénés. L’alcool américain arrivait Constantinople en quantité si énorme, que les exportateurs des Élats*Unis se sont avisés d’en faire transiter une partie par Rotterdam : le poison est vendu comme marchandise hollandaise et, si l’effet produit est le môme, les chiffres qui figurent aux statistiques des douanes sont moins scandaleux. Les maisons de jeu sont devenues innombrables, également fréquentées par les Européens et par les indigènes, et protégées par la complaisance, souvent intéressée, de la police britannique. Péra n’a jamais été l’asile de toutes les vertus; mais il est devenu, depuis l’occupation, un mauvais