188 LA QUESTION TURQUE de donner aux Turcs la liberté de conscience. Car ils ne l’ont point: selon les lois de l’Empire, un chrétien peut se faire musulman, mais il n'est pas permis à un musulman de changer de religion. Cette inégalité n’est-elle pas énorme ? «Nous avons fait ce que nous avons pu pour vivre en bon accord avec les Turcs. La génération qui a précédé la nôtre préconisait la collaboration et la pratiquait très loyalement, non seulement dans les grandes affaires de l’État, mais dans la vie de chaque jour. Je dois reconnaître que les Turcs s’y prêtaient volontiers ; car, quelque étrange que la chose puisse vous paraître, la seule nation qui leur inspire confiance, c’est la nation grecque. Ils confient au Juif, à l'Arménien certaines besognes inférieures ; mais c’est chez les Grecs qu’ils choisissent leur avocat, leur médecin, leur homme d’affaires: ils savent que nous ne les avons jamais trompés. « Cependant nos bons offices, privés ou publics, n’ont jamais été reconnus par la garantie formelle d’une condition telle que des hommes libres et des chrétiens puissent l’accepter. Dans cet État, dans cette ville où nous sommes tout, les Turcs nous traitent en sujets et en intrus. Car les Grecs sont ici chez eux ; Constantinople est leur héritage et doit leur appartenir. Nous déplorerions seulement qu’ils y fussent réinstallés par la seule volonté de l’Angleterre, et notre vœu ardent, unanime, est que justice nous soit enfin rendue grâce à l’intervention commune de l’Angleterre et de la France. « Il n’y a qu’une question en Orient, c’est la question de Constantinople. Laisser cette ville aux Turcs? c’est impossible ; aux Russes? ce serait dan-