6 LA QUESTION TURQUE professeurs et aux religieux, aux fonctionnaires de l’État et aux hommes privés ; j’ai interrogé sur la question turque des Grecs, des Arméniens et des Juifs, choisissant, parmi les ecclésiastiques et parmi les laïques, les personnes les plus qualifiées. Quelquefois, pour éclairer et compléter cette enquête, que les circonstances ont bornée à la seule capitale et à ses proches environs, j’ai fait appel aux souvenirs d’un voyage antérieur, qui m’avait conduit, de Jérusalem à Smyrne et de Diarbékir à Bagdad, à travers toutes les provinces de l’ancien empire, et mis en contact avec les éléments les plus divers de leur population. Je n’avais pas revu Constantinople depuis l’automne de 1912. Je m’attendais à y trouver des changements profonds, au dehors comme au dedans, dans les choses comme dans les esprits. Mais ni la physionomie actuelle de la capitale ottomane, ni l’atmosphère mêlée d’aspirations confuses et de sourdes haines où s’agitent ses habitants, ne se peuvent imaginer ni pressentir. J'essaierai de montrer ce qui m’en est apparu et ce que j’en ai cru deviner. De loin, rien de changé à la silhouette fameuse de Stamboul : coupoles et minarets découpent dans un ciel vaporeux et nacré leur ligne immuable. Le premier signe qui révèle au voyageur arrivant par mer la dernière aventure de ce coin de terre où tant d’histoire est inscrite, c’est, à la Pointe du Sérail,