190 LA MONARCHIE FRANÇAISE DANS l’aDRIATIQUE leur état. » L’affirmation du diplomate français était exagérée. La vérité, c’est que Raguse ne s’était jamais trouvée depuis un siècle dans une pareille détresse. Tout cela n’empêchait pas Ragnina d’adresser de sages conseils à son Gouvernement sur une nouvelle orientation politique. « La puissance turque — écrivait-il en janvier 1773 — semble bien se trouver en décadence. Cette guerre l’affaiblira énormément surtout si l’Empereur se déclare contre elle. La maison d’Autriche s’agrandit chaque jour davantage. Elle viendra peut-être à nos confins. Cet autre Empire (russe) va devenir très puissant sur terre et sur mer. Il est donc nécessaire que Vos Excellences réfléchissent à tout afin de mériter la protection et l’appui de ces deux Cours \ » Le Sénat réfléchira. Il renouvellera avec Marie-Thérèse le traité de protection de 1684, mais il n’entreprendra rien pour se concilier la Russie — cause lointaine mais puissante de l’attitude d’Alexandre Ier en 1815 — il défendra même à Ragnina de négocier un traité de commerce et de navigation avec « l’ennemi de la religion catholique ! » Panin narguait Ragnina pour la politique turcophile de Raguse : « Vous évitiez soigneusement d’offenser les Turcs ; quant à nous, Vous nous considériez trop éloignés de Vos Etats. Vous ne Vous imaginiez pas que notre flotte viendrait dans la Méditerranée ! C’est pourquoi Vous serviez les Turcs contre nous 2. » En effet, Raguse ne s’attendait pas à l’apparition du pavillon russe dans la mer grecque et d’ailleurs l’Europe tout entière partageait son étonnement. En septembre, Orlov revint à Pétersbourg en triomphateur. Catherine lui avait décerné le titre de « Tchesmenski ». 1. Premier partage de la Pologne : L’Autriche augmente sa population de 2.600.000 Polonais et Russes. 2. Ragnina au Sénat, 27 avril 1773.