102 LA MONARCHIE FRANÇAISE DANS L’ADRIATIQUE lubleraent lié». «Cette église—écrivaient de Sofia un groupe de nobles au Sénat de leur patrie — est la cause de toutes nos affaires sur cette place. Sans elle nous déserterions sous peu de jours, avec tous nos compatriotes, cette ville, où nous luttons quotidiennement avec la persécution des Juifs. C’est l’église qui nous empôclie de quitter ce marché *. » Pour tout dire, ce protectorat était comme un lien moral qui rattachait Raguse au monde yougoslave de l’arrière-territoire. Cette ville, qui fut, du xve au xixe siècle, le seul pied-à-terre yougoslave demeuré libre et indépendant après la faillite des autres Etats de la même race, entretenait par sa seule présence dans les Balkans l’espoir des futures revanches, le rythme et le souvenir consolateur de la civilisation. Au xvine siècle, cependant, la République n’avait plus la force de couvrir de sa protection les établissements religieux de 1a. Péninsule. Les colonies ragu-saines lentement se mouraient. Le commerce ragu-sain, jadis si puissant2, s’était progressivement restreint à la Bosnie-Herzégovine et un peu à l’Albanie. La décadence politique de Raguse n’était nulle part aussi sensible aux yeux de l’observateur que dans les villes balkaniques. Un rapport du comte de Cas-tellane au comte de Maurepas nous trace un tableau à peu près exact de l’état de faiblesse auquel s’était réduit un petit Etat dont jadis les religieux et les fidèles se vantaient d’être les protégés. La congrégation de la Propagande avait transmis en 1747 à Louis XY un mémoire pour demander l’institution d’un vice-consulat français à Philippopoli 1. Mémorandum du 31 octobre 1663. Arc h. Rag. 2. Jusqu'à la lin du xv* siècle, Raguse avait le monopole de l'exploitation des mines d'argent et de cuivre en Bosnie et en Serbie.