CHAPITRE IV L AFFAIRE LE MAIRE (1757-1764) Par une étrange contradiction, l’envoi à Eaguse d’un représentant français, en partie agent commercial, en partie agent diplomatique, loin de contribuer à l’entretien et au développement des rapports amicaux entre la France et Raguse, fut, au contraire, le point de départ d’une suite d’incidents qui refroidirent à plusieurs reprises ces rapports et l’amitié trois fois séculaire entre la Couronne de France et la République de Saint-Biaise. Ce fut avant tout im effet de la nature oligarchique du Gouvernement ragusain. La concentration du pouvoir dans un petit nombre de familles devait fatalement conduire à un rétrécissement de l’horizon politique d’un petit gouvernement qui se sentait d’une certaine façon isolé et perdu parmi les grands groupements politiques et nationaux de l’Europe. Certes, toutes les formes de gouvernement du xvme siècle étaient considérées comme légitimes : Venise, Gênes, Raguse et les villes libres d’Allemagne représentaient toutes les variétés du Gouvernement républicain qui avaient traversé le moyen âge '. Mais qu’elle devenait difficile et douloureuse cette tenace résistance de vieux organismes guettés par les intérêts dynastiques et nationaux des grandes monarchies ! De là, toutes 1. Albert Sorel. L’Europe et la Révolution française, 1, 14-15.