148 LA MONARCHIE FRANÇAISE DANS L’ADRIATIQUE protection à un Etat petit et faible, mais souverain et libre » Le Maire était accusé : d’être entré de force dans une maison où des demoiselles étaient seules, après en avoir corrompu le domestique ; d’avoir, sans aucune raison, frappé un citoyen, le sieur Carlo Testi, d’un coup de chapeau sur le visage; d’avoir insulté le patricien Ser Baldassare Secondo di Buc-chia ; d’avoir voulu introduire une seconde fois le vin de Lagosta à Raguse ; d’avoir empêché le sieur Patrizzi de bâtir une maison sur un fonds qui lui appartenait. Une partie des documents concernant cette seconde affaire s’est perdue, mais nous avons deux précieux documents sur la mission Sorgo, deux lettres de l’envoyé de la République qui, fort heureusement pour nous, furent interceptées par Le Maire — ce qui nous montre bien le caractère aigu du conflit — et envoyées par lui à Choiseul-Praslin, le cousin, « la doublure » du duc de Choiseul, auquel celui-ci avait confié en 1761 les Affaires Etrangères J. Dans ses dépêches, Sorgo se révèle habile négociateur et ennemi acharné de Le Maire. Il est plus acharné que son Gouvernement. H pousse celui-ci à se débarrasser à tout prix de cet « ennemi domestique », de ne pas se contenter d’une simple réprimande du ministère comme au temps de Boscovich. « En un mot — dit-il quelque part — je ne dois pas laisser ignorer à Vos Excellences que Le Maire ne néglige rien au monde pour faire en sorte que la nation française devienne tout à fait notre ennemie et si l’on n’y remédie pas promptement je craindrois 1. Venise, 14 août 1763. Correspondance. 2. Les deux lettres de Sorgo sont datées de Versailles le 8 et le 12 décembre. Elles sont à. la Bibliothèque Nationale française, 10772, p. 129.