58 LA NOUVELLE MACÉDOINE IOUGOSLAVE. au moment de la récolte ; un travail régulier et dur, la rabota, dont la joie s’exprime si bien dans les chansons locales, entre autres : « Biliaria platno beliatché... » (Biliana aux amples linges...), la lavandière du lac d’Okhrid, répandues en maints coins iougoslaves, y compris la Bulgarie.,On est même allé jusqu’à retrouver des caractères psychologiques communs : mais nous ne suivrons pas sur ce terrain les écrivains serbes ou bulgares1. Les conditions légales. — Les traités de 1919-1920, qui détruisent l’Au-triche-Hongrie et l’Empire ottoman, marquent l’avènement de démocraties rurales, qui s’emparent des grands domaines, des tchiilik en particulier. Cette évolution générale de tous les pays balkaniques se manifeste en Iougoslavie comme ailleurs. La création du royaume des Serbes, Croates et Slovènes s’accompagne d’une large réforme agraire. Le décret du 24 septembre 1920 «sur la colonisation des nouvelles régions méridionales » précise bien le but de cette révolution : « Par colonisation, on entend la cession par l’État de la terre pour l’exploitation et l’habitation » (art. 1er). Les terres octroyées sont : « Io les terres domaniales disponibles ; 2° les terrains communaux et ruraux et les jachères dans la mesure où ils excèdent les besoins réels de ces villages en pâturages et pacages pour les troupeaux ; 3° les terrains vagues ou abandonnés par leurs propriétaires... » ; 4° les terres expropriées en vertu de décrets antérieurs, soit les propriétés de plus de 100 arpents (160 ha.) (art. 2). « Ont droit à la colonisation tous les citoyens du royaume S. H. S. qui s’occupent d’agriculture ou se livrent à un métier rural, n’ont pas du tout ou ont insuffisamment de terres, puis tous ceux qui, désormais, désirent s’adonner à la culture d’une terre qui leur aurait été concédée en qualité de colons » (art. 4). Chaque famille recevra 4 hectares (si elle n’est que de deux membres) ou 5 hectares, sauf celles qui se trouvent à proximité de centres urbains qui recevront au-dessous de ce minimum, mais pas moins de 2 hectares ; aux zadrougué familiales on accordera des lots de 2 à 5 hectares par membre (2 hectares à chaque jeune homme de 16 à 21 ans, 3 hectares par célibataire, 4 hectares pour un homme marié, et 5 hectares au chef de la zadrouga, âgé de moins de 50 ans) (art. 5). Les colons ne peuvent aliéner la terre tant qu’ils n’en sont pas propriétaires (art. 23). Ils deviennent propriétaires après 10 ans (art. 26)2. La constitution de la Saint-Guy (du « Vidov dan »)(28 juin 1921) incorpore les principales dispositions agraires dans le fondement même du nouvel État. Elle fait passer à l’État les grands domaines forestiers (art. 41). Elle abolit les « charges foncières d’orgine féodale » et attribue « la pleine propriété de ces terres aux tenanciers et aux cultivateurs qui les travaillent » (art. 42). Elle confère à une loi le soin d’organiser « l’expropriation des grandes propriétés et leur distribution en toute propriété à ceux qui cultivent la terre ». « La colonisation se fera de préférence par les soins de coopératives de colonisation librement organisées. On veillera à pourvoir les colons des moyens nécessaires à l’obtention d’un rendement satisfaisant » (art. 43). Ce fut l’objet propre de la loi du 22 mai 1922 « sur la colonisation des nouvelles régions méridionales » que d’appliquer ces principes généraux à la Vieille 1. Cf. Nedelkovic : O psiliitchkom lipoii ioujnoserbiianatsa —- le type psychique des Serbes du Sud —, Belgrade, 1929, in-16, 54 p. 2. Cf. Srebreno-Dolinski, op. cit.