LE DOMAINE COMMERCIAL MACÉDONIEN. 263 de négoce. Les navires de l’Occident, surtout de France et d’Angleterre, viennent en 1854 y chercher du blé, de la laine, apportée des steppes de Iénidjé, de Strou-mitsa, de Doïrane, tandis que les troupeaux qui les fournissent vont estiver en Albanie, ou le coton de la région de Serrés. En échange, la Grande-Bretagne y débarque son fer, son plomb, son fer-blanc, ses montres et ses pendules, ses bijoux et ses étoffes ; la France envoie ses casquettes, son papier et foule de produits coloniaux, café, sucre, indigo, poivre, etc. ; l’Allemagne, l’Italie expédient des étoffes, des porcelaines et des verreries ; de Russie viennent des fourrures et d’Égypte les gommes, l’encens et le café d’Arabie1. Dix ans après, il semble que ce soient les soies qui l’emportent dans le commerce d’exportation de la Macédoine : la France développe son industrie lyonnaise, et elle va chercher, partout où elle la trouve, la matière textile, puisque sa propre soie grège ne suffit plus à ses besoins; elle demande à Salonique des cocons, des « graines » de vers à soie. Le marché de Salonique demeure en dépit des vicissitudes politiques. Malgré une industrie naissante, au surplus plus artisane encore que capitaliste, son arrière-pays reste essentiellement agricole, ne saurait se passer des matières premières, des objets manufacturés du dehors. Ces besoins ont donné naissance aux foires annuelles d’échantillons, qui, depuis 1926, se tiennent chaque automne à Salonique même, à l’Est de la vieille ville, au delà des murs byzantins, au large dans la vaste place du Champ de Mars, entre les casernes et la mer. Comme la ville même, la foire s’est déplacée vers la mer et vers l’Orient. Le catalogue de ces foires présentes montre clairement l’étendue du domaine commercial de Salonique. Les commerçants indigènes viennent y exposer les produits agricoles du crû : bétail, farines et huiles, pâtes alimentaires, figues, raisins et olives, tabacs et cigarettes, poteries et savons, broderies soyeuses et cotonnières, tricots et cordes, tapis surtout, l’industrie nouvelle par excellence. Ce ne sont pas seulement des particuliers qui tiennent boutique, mais encore les coopératives et les communes villageoises : ainsi les coopératives agricoles de Drama, de Catérini étalent leurs tabacs en feuilles, les municipalités de Sia-tista, d’Edessa, de Cozani, de Flôrina, de Drama leurs raisins, leurs fruits secs, les produits de leur élevage. D’autre part, les marchands étrangers de toute l’Europe centrale, iougoslave, hongroise et surtout allemande, enfin ceux d’Amérique, viennent offrir tous les objets manufacturés possibles : porcelaines et céramiques, outils et bicyclettes, automobiles, machines variées depuis l’humble machine à coudre jusqu’au tracteur agricole, fils, vêtements, parfumerie et articles pharmaceutiques, etc., etc2. Une visite à la foire de Salonique de ces dernières années donne l’impression d’un pays en transformation et qui s’équipe : c’est une clientèle nouvelle que l’industrie européenne aperçoit maintenant en Macédoine. Salonique se présente ainsi dans son double rôle commercial qui, au reste, n’est pas le seul. Salonique est surtout un marché local d’exportation et un marché international d'importation et de distribution. Nous verrons plus loin son troisième rôle, celui de marché de réexportation. 1. Lewis Fabley : The resources of Turkeg, Londres, Longman, Robert et Green, 1863 (in Bulletin commercial de Macédoine, n° 14, 1er décembre 1927). 2. Odègos lès III dielhnous ekthéséôs Thessalonikès (Guide de la III« Foire internationale de Salonique), 30 septembre-14 octobre 1928, Salonique, typ. Akouaronè, in-16, 315 p.