CHAPITRE XXVI LA NOUVELLE SALONIQUE Le plan d'ensemble. — Créer une ville neuve, tout en conservant les courants de l’ancienne, élaguer les obstacles mais respecter les souvenirs historiques, les habitudes économiques et sociales : telle est la tâche de l’urbaniste. Ce fut l’œuvre entreprise par M. Ernest Hébrard. A la commission de spécialistes, nommée par Vénisélos, composée d’un urbaniste anglais illustre, Th. Mawson, de son fils et de quelques Hellènes, MM. Kitisikis et Guinis, le plan français s’imposa par son ordonnance toute classique qui, cependant, ne bouleversait pas la ville, adaptait les nécessités modernes au site géographique et aux établissements humains. Le gouvernement grec adopta l’esquisse, et, avec quelques remaniements de détail, chargea l’auteur d’en suivre le développement, l’application. La nouvelle Salonique est donc une œuvre française, fondée par notre école d’architectes urbanistes. Et, peu à peu, c’est une Salonique tout autre — grecque et moderne — qui ressuscite des cendres de la ville « turque » et juive. Déjà les siècles avaient réussi un agencement assez clair. Nous avons vu que Salonique s’ordonnait naturellement en trois zones : le Centre, les bazars et le Konak, commerçant et administratif ; l’Ouest, le quartier populeux, ouvrier du « Vardar » ; le Sud-Est, le quartier élégant, bourgeois de « Calamaria ». Ce plan général est conservé, et l’incendie permet de le systématiser, si l’on peut dire. Le plan Hébrard comporte essentiellement la division en trois zones, groupant les différents quartiers, englobant d’avance la future extension de la ville. 1° Au Centre, les quartiers des affaires : le commerce de luxe et de détail, avec ses formes locales et pittoresques, les traditionnels bazars ; mais aussi les affaires administratives, les établissements publics, mairie, tribunaux, préfecture, bureaux des services ministériels, etc.. Ce double bloc,en bas, le «centre du commerce » ; en haut le « centre officiel », forme un quadrilatère irrégulier de 1 km. 300, le long de la mer, sur 1 kilomètre, de la mer à la ville haute. C’est à peu près toute la partie brûlée, dont la reconstruction est le plus facile. 2° A l’Ouest, les quartiers du grand commerce et de l’industrie. Ici encore deux centres qui se juxtaposent : près de la mer, le long du port et de l’extension projetée du port le « centre des entrepôts », qui peut, selon les besoins, s’étendre indéfiniment sur le littoral ; plus au Nord, le « centre des habitations ouvrières » — c’est le vieux faubourg du « Vardar » — et il se prolongera vers le Nord-Ouest par de futurs logements ouvriers et le « centre des usines » que l’on cherche à regrouper.