LA SECONDE COLONISATION. 93 au reste, le reconstruire au kilomètre 13, sur la route de Krouchévo : le service de la colonisation préparera le terrain, les briques cuites, imposera le plan des maisons, construira l’école et l’église. L’expérience a enfin servi. Du même type, mais plus restreint, est Karadjordjévo, à 1 km. 500 au Nord-Ouest. Il est formé de 14 maisons, peuplé de 13 familles, toutes dalmates (des environs de Sinj), arrivées en 1924. Tous les paysans portent la petite calotte rouge bordée de noir de Dalmatie ou le calot kaki de l’armée serbe. Ici la montagne n’est pas loin : la maison — toujours de même architecture — a un soubassement de schistes, surmonté de briques crues sous un toit de tuiles. Le village s’aligne, un peu irrégulièrement, entre des champs de blé et des prairies, où paissent 120 bœufs, 150 moutons, la vraie fortune. C’est ainsi que vivent aussi les 8 familles dalmates de Milochévo, plus au Sud, au pied des pentes, sur la rive gauche de la Tserna qui va s’étaler dans la plaine. C’est aussi une colonie entièrement neuve que Pétrovo (11 km. S.-O. de Prilep) sur l’ancien marais Sadané : 15 maisons abritent des Dalmates de Benkovats, près de Chibenik, et de Sinj, installés en 1922, 1925 et 1928. Au milieu des champs de seigle et surtout des pâturages, où se promènent 105 bœufs et 250 moutons, de part et d’autre d’un large chemin, s’alignent les masures de pisé, couvertes de tuiles. Chacune d’elles, ou presque, possède son puits. Et le paysan qui, au contraire de ses voisins des autres villages, ne se plaint pas de la terre, se contente de réclamer plus que son lot de 5 hectares, A 5 km. 500 au S. de Prilep, à 500 mètres de la route de Bitolj, le nouveau village de Novo Lagovo groupe 20 familles dalmates de la région de Knin. Depuis 1922, se sont bâties, toujours de chaque côté de la vaste piste, les 20 maisons de briques crues, enduites de chaux, et de tuiles. Ici encore les paysans souffrent du manque d’eau sur ces terres qui « n’ont pas été labourées depuis cinq cents ans » dit l’un d’eux. Cependant poussent déjà le blé et le maïs, le seigle et l’orge, même le tabac, et, au loin, erre le troupeau du village : 62 bœufs, 120 moutons. Un puits artésien se fore. L’eau ! c’est le cri général qui s’élève de ces foyers de transplantés. L’eau est difficile encore à atteindre, en tout cas à distribuer. De place en place on rencontre une de ces stations-modèles, que l’institut d’hygiène de Skoplié, que la « Maison de santé » de Prilep ont fait surgir de cette ancienne désolation. Voici, à 5 kilomètres Ouest de la route de Bitolj (20 km. S.-O. de Prilep), au pied des pentes, dans le village d’Ivanievtsi, entièrement reconstruit de pierres et de tuiles, la source captée, aménagée. Et si les femmes, alourdies de leur robe de bure aux broderies rouges, emmitouflées dans leur coiffe blanche, résistent encore à l’attrait de l’eau, le paysan vient au bain populaire. De bœufs blancs tirent la charrue aux deux roues de bois, mais au soc de fer. Un air d’aisance, tout neuf encore. Les colonies choumadiennes de la Pélagonie centrale. — Ceux qui ont traversé il y a dix ans la plaine au Sud-Est de Bitolj, steppe déserte près des pentes, nappe fangeuse près de la Tserna, coupée de place en place par de pauvres chaumines de boue et de paille, ne peuvent plus la reconnaître. Certes, les marais subsistent encore. Mais les buffles, qui s’y vautraient, sont moins nombreux aujourd’hui que les bœufs gris et blancs, aux longues cornes d’abondance, importés de Slavonie. Bien des masures en ruines encore, derniers vestiges de la guerre. Mais, à côté, des maisons neuves, de briques, de tuiles, assemblant