CHAPITRE VI L’INSTITUT D’HYGIENE DE SKOPLIE ET LA LUTTE ANTIPALUDIQUE L’organisation générale. — L’insuccès de la colonisation de la Macédoine comportait une leçon. On ne manqua pas de la tirer. Le peuplement, le partage avaient été abandonnés au hasard, ils s’étaient de préférence portés sur les régions insalubres. En Macédoine on joue de malheur : là où il est fertile, le pays est malsain, et il est sain aux endroits stériles. Ce sont donc surtout les zones insalubres qui attirent les colons. Il est apparu — tardivement sans doute — que coloniser et civiliser, cela voulait dire d’abord assainir. La situation sanitaire n’était, durant les premières années, rien moins que satisfaisante. Tous les colons, tous les fonctionnaires, dépaysés, tombaient malades. En 1920-1921, des gares ne pouvaient mettre en marche des trains entiers faute de personnel. En 1922-1923 des familles de colons, de paysans, restaient toutes couchées, grelottant de fièvre : les bras manquaient pour la culture. Pas un médecin dans les campagnes. Pas un bâtiment sanitaire. Nous avons vu plus haut les ravages causés par la malaria, sans compter la tuberculose, la typhoïde, les maladies infantiles. En 1921 est fondée, à Bitolj, la première station sanitaire. Quelques missionnaires de la science sont envoyés de Belgrade à Sko-plié, Chtip et Vélès. Dès mai 1919, avant même la signature des traités de paix, qui fondaient le royaume serbe-croate-slovène, un Ministère de la Santé publique est établi à Belgrade, chargé de « protéger l’augmentation régulière de la population en favorisant de nombreuses et saines naissances », de « la protection de la santé publique », d’installer « des institutions pour le traitement et la préservation des maladies », de « l’étude de la biologie normale et pathologique de la nation », enfin, de « l’éducation populaire en matière d’hygiène » (loi du 21 novembre 1921). Le chef de la section d’hygiène, le docteur Chtampar, créait à Belgrade un « Institut de médecine sociale » — dont le nom seul est un programme —, y adjoignait les instituts associés. Celui de Skoplié, 1’ « Institut pour les maladies tropicales », devait prendre bientôt le nom plus général, plus conforme à sa destination véritable, d’« Institut d’hygiène », chargé de « garder » la santé populaire dans la « Serbie méridionale ». Ses bâtiments s’élevaient peu à peu, au Sud de la ville, sur les terres vierges au delà de la gare. L’État v affectait 20 millions de diñara, mettait à sa disposition, en outre, un budget annuel de 9 millions 1/2 (5 millions 1/2 pour le matériel,