LA MACÉDOINE ORIENTALE. 179 de cette haute plaine les villages de réfugiés : Lyssé qui regarde l’Ouest, Couma-nitsa exposée au midi, et, plus au Nord, Vesmi sur la route de Névrokop. Ce sont des villages de garde-frontière, cultivateurs et bergers de chèvres, réfugiés du Pont. Cette plaine, déserte naguère, est maintenant couverte de tabac (dont la « récolte tardive » se fait ici en octobre), de maïs, de seigle, d’avoine, de haricots, de pommes de terre, sans compter les pâturages. Le bourg de Zyrnovon, qui se cache dans ses bosquets, montre encore des débris des guerres récentes. On y a établi, dans les maisons mêmes abandonnées par 100 familles bulgares, 105 familles de réfugiés qui sont venues s’accoler aux 255 familles indigènes : maisons de pierre, trapues, solides, isolées. Chaque famille a reçu 0 ha. 75 de terres cultivables et 0 ha. 50 de prairies à foin, sans compter l’usage des pacages communaux. Des bœufs y paissent. Type de colonisation de montagne. Quand on descend de la montagne vers la plaine même de Drama, on voit avec netteté les deux autres types de villages (v. cartes 13 et 14, p. XXXIV-XXXV). Sur les cônes de déjection des torrents qui, du Nord ou de l’Ouest descendent vers l’Aggistis (avant qu’il ne se jette dans le lac d’Achinos), d’anciens et sombres villages ont reçu des réfugiés. Ainsi, au Sud-Ouest, aux pieds du Pirin, qui profile sa silhouette droite et noire, un peu à l’écart des boues et des inondations de l’Aggistis, le village d’Alistrati : à côté des 750 familles indigènes se sont installées, dans les vieilles demeures de pierres, dans de neuves habitations de briques, 325 familles de réfugiés d’Asie Mineure, des bords de la mer Noire et de Thrace : à l’automne les murs exposés au soleil sont tapissés de feuilles de tabac ; à l’entour pourrissent les chaumes du maïs. Au loin la cadence monotone des métiers qui tissent la laine. Dans la plaine même s’étalent des villages entièrement neufs. On les devine de loin à leur forme régulière, carrée et, quand les arbres qui les cachent parfois le permettent, à leur couleur rouge qui contraste avec le gris des villages des pentes. Tel, à 11 kilomètres S.-O. de Drama, Sitagros, nom récent, qui cache celui de Minaré tchiflik : il s’agit en effet d’un ancien tchiflik turc, où ont pris place 200 familles, toutes réfugiées : immense village flambant neuf dans ses briques rosées et ses toits rouges, coupé en deux par une longue rue, dominé par les deux installations modernes, nécessaires à cette vie dans la steppe de jadis : le puits artésien, profond de 30 mètres, et le moulin à pétrole. Voici encore, à 14 kilomètres O. de Drama, le gros village de Pyrsopolis (ancien Prossotsani), qui abrite 1 800 familles, Calos Agros (ancienne Osmanissa) à 7 kilomètres S.-S.-O. de Drama sur le chemin de fer qui vient de Serrés. La banlieue même de Drama s’allonge en faubourgs de cultivateurs : à toutes les sorties de la petite ville, qui s’étale de plus en plus sur la plaine, quittant les bords mêmes, les contreforts du Rhodope où elle défia longtemps les envahisseurs, les maisons se posent en deux files rectilignes, parfois en trois, en quatre : ainsi au Sud-Ouest, à l’arrivée de la route et du chemin de fer de Serrés ; sur 1 km. 500, en plusieurs groupes se serrent les cubes de briques grises, crues, plus rarement de bois, de ciment, des cultivateurs de tabac. Ces faubourgs se sont installés sur les terres d’anciens tchiflik, qui ont été morcelées, distribuées : le nom des tchiflik figure encore sur les cartes anciennes ; ce sont maintenant des alignements disciplinés de colonies. De ces trois types de villages, les plus nombreux sont ceux des pentes. Dans la partie méridionale de la plaine, que les marais de Philippes couvrent presque entièrement, les nouveaux villages ont naturellement été construits sur les