254 LA MACÉDOINE BULGARE ET LES MACÉDONIENS EN BULGARIE. Les agriculteurs de la plaine. ■— C’est entre Iambol et Bourgas que la colonisation est le plus dense. Quand on quitte la sous-préfecture de Iambol (23 037 habitants), encombrée dans ses rues étroites par les carrioles lentes et les buffles placides, pour s’en aller vers le Sud, c’est le plus monotone paysage qui vous puisse rassasier : dès qu’on a traversé la fangeuse Toundja et le rideau de peupliers, borne de la rivière encore sèche à la fin de l’été, on court sur la steppe nue, sans un arbre ; au loin, de très rares villages enfermés dans leurs murs gris. Il faut arriver aux pieds des coteaux de Saint-Élie (Svéto Ilijinski vrhové) pour qu’aux vaines pâtures succèdent des collines plus douces. Un village s’y accote, Ak bounar (19 km. S.-O. de Iambol) entre des champs de maïs et des potagers : là 122 maisons de réfugiés se joignent aux 300 maisons indigènes, 1 800 nouveaux venus aux 2 200 paysans enracinés. Le vieux village est dans la plaine ; le neuf, au contraire, grimpe sur la colline exposée au Sud-Est ; les maisons régulières s’y alignent en briques cuites, couvertes de tuiles, la terrasse largement ouverte, où la femme fait mouvoir le primitif métier à laine. 60 maisons ont été bâties par les réfugiés eux-mêmes ; les autres sont d’anciennes demeures de Grecs, qui ont quitté le village ; chaque maison neuve a coûté 38 920 leva. Délaissant la basse vallée de la Toundja, enfoncée dans ses berges profondes, la route de Iambol à Kavakli, piste poudreuse qui se tient à 200 mètres d’altitude et que fait construire le Commissariat, atteint, 30 kilomètres plus au Sud, le village de Sinapli. Voici en élaboration un hameau de réfugiés. Toujours la double agglomération. L’ancienne se terre près d’un ruisseau, affluent de droite de la Toundja, cahutes de boue et de paille, à peine visibles entre les pentes argileuses de la vallée. Des potagers, où les choux dominent. Plus haut, de vastes chaumes, qui furent des champs de maïs. Là, sur une colline, bien exposée au midi, les constructions neuves : 92 maisons sont bâties et alignées, et l’on commence les fondations, légères, de 48 à élever, de quoi loger 1 236 réfugiés, Macédoniens et Thraces. On est en plein travail préalable, et on avance avec lenteur : c’est que la route n’est pas faite encore ; la voie ferrée est à 50 kilomètres; la tonne de transport revient à 600 leva. Une maison — 1 200 mètres carrés avec sa cour —, murs de briques blanchis et toits de tuiles, coûte 57 800 leva. Il faut, pour l’édifier, trois ouvriers à 80 jours de travail. L’entrepreneur, qui s’est chargé de la bâtisse, est réglé en trois étapes : après les fondations, avant la toiture, lors de l’achèvement complet. Le nouveau propriétaire s’acquittera par échelons en quarante ans : remboursement des semences, du matériel agricole, du bétail, puis de la maison, de la terre enfin. A Elhovo (4 038 habitants), marché rural aux larges rues faites pour les charrois, on traverse la Toundja. La route, qui remonte la rive gauche, demeure dans la plaine, vers les 100 mètres, mais suit le pied des collines thraces, de la Strandja, qui lentement s’elève à l’Est. Dominant légèrement la plaine, dans des abris ravinés, que le ruissellement découpe à l’infini en l’absence d’arbres, d’autres villages abritent des réfugiés. Mais la répartition s’est faite sur un autre type. La topographie commandait le strict mélange. Ainsi à Moursatli (26 km. S.-S.-E. de Iambol), les 30 maisons des immigrés se juxtaposent aux anciennes, simplement un peu à l’écart : le village n’a au reste reçu que 172 réfugiés parmi ses 3 500 habitants. Maisons du type le plus simple, auquel le paysan, à l’aide d’un prêt — 12 000 leva — ajoute lui-même une étable. Chacun a obtenu un