— 3o — lieu de dire que les Ragusains ne surent écrire qu’en latin et en serbe. On peut affirmer le même fait au sujet de la Dalmatie centrale et septentrionale. Jusqu’au premier tiers du XIXe siècle, les Dalmates n’écrivirent presque jamais l’italien. Ils le parlaient, tout simplement. Le vénitien se conserva, avant tout comme la langue de l’Etat, pour les nécessités du service, du commerce, de la navigation, des rapports avec la métropole. Ensuite, il subsista comme signe des privilèges de la noblesse. Celle-ci bien différente de l’active noblesse du quinzième et du seizième siècles, se contentait de végéter, à l’exemple de la noblesse vénitienne. Plus que ne fit jamais le patriciat étranger, elle vivait familièrement avec le paysan, par suite de toutes ces caractéristiques slaves dont, malgré l’emploi du langage italien, elle portait la marque très visible. Sans écoles, sans nourriture pour l’esprit, comment la province ne serait-elle pas tombée dans le marasme, dans la stérilité intellectuelle ? Les ancêtres avaient voyagé ; et, au contact des dramatiques vicissitudes de la lutte entre l’Orient et l’Occident, l’esprit national lui-même et aussi le culte de la littérature slave avaient éclairé le peuple par en haut. Quoique élevés en Italie, et pour cette raison même, les nobles et les bourgeois rapportèrent de là un plus vif attachement à la langue natale, comme nous le verrons ensuite