— 23o — rant du développement d’une nation slave avec laquelle la destinée historique lui commandait de collaborer. Les pages écrites par le prophète génois durent attendre le grondement du canon balkanique pour être exhumées, lues par un petit nombre, considérées par de très rares personnes comme quelque chose de plus que l’épanchement de l’habituel idéalisme mazzi-nien. Vainement Prati, Tommaseo et quelques autres clairvoyants Italiens avaient réclamé la fondation d’une chaire d’histoire et de littérature yougoslaves, sur le modèle de celle de la Sorbonne, pour l’étude d’un monde beaucoup mieux connu des générations vénitiennes du quinzième siècle que des zélateurs du XXe siècle, qui pourtant se flattent de reprendre les traditions vénitiennes.1 Toutes ces nobles intentions échouèrent misérablement contre l’indifférence universelle. Dans le mouvement yougoslave, développé depuis les Bouches de Cattaro jusqu’à la Drave et au Danube, on ne voulut rien distinguer, sinon ce qu’y voyait la police autrichienne : c’est-à-dire une série de tentatives faites par quelques cerveaux exaltés, instruments conscients ou inconscients de la terrible Russie. On ne voulut voir que des conspi- 1 L’université de Londres vient d’appeler le professeur Masaryk à occuper la chaire de slavistique et un jeune Croate, M. Toutsitch, est devenu à la même université professeur de langue et de littérature serbo-croate.