— CVIII — à peu près complètement vénitienne ; c’était déjà trop de Trieste et de Raguse. Que le domaine maritime de voisins puissants s’étendît, et Venise voyait ses intérêts commerciaux sérieusement compromis. » Il ne faut pas se laisser éblouir par les artistiques Lions de Saint-Marc sur les remparts des villes dalmates, ni par l’attitude bienveillante ou, pour mieux dire, somnolente du gouvernement vénitien en Dalmatie. Il ne faut pas non plus nous laisser tromper par les panégyriques post mortem, ni par les fameuses scènes des drapeaux vénitiens pathétiquement enterrés sous les autels de Zara et de Perasto. Oui, le gouvernement vénitien n’a pas infligé à la Dalmatie le fléau de la féodalité. Oui, il n’a pas permis aux Turcs de s’installer sur le rivage slave éclairé par le sourire latin. Oui, le souvenir des luttes en commun pour la défense de la civilisation et les Te Deum à St-Marc faisaient passer un frisson d’orgueil chez les familles dalmates. Mais ce gouvernement étranger ne fit rien pour la Dalmatie. Ni écoles, ni hôpitaux, ni routes. Sans l’initiative privée des Dalmates, la malheureuse province aurait sombré dans les ténèbres et dans le dénûment. La beauté de Venise et son aspect féérique, sa gloire militaire et Vépanouissement de son art, le mystère et l’ivresse qui planaient sur elle ne pouvaient consoler le peuple dalmate d’une vie brisée. Aussi il resta farouchement slave