LA COURONNE DE VENISE qu’une boutade, et les nobles vers de Childe Harold la font aisément pardonner. Je n’ai pas trouvé sur les registres le nom de Stendhal, qui nous dit cependant être resté quatre jours à Arqua, et qui, certainement, visita la maison du poète, bien qu’il n’en parle pas. Pourtant le loisir de noter ses impressions ne lui fit pas défaut, puisqu’il eut le temps d’écrire une longue dissertation sur les manières dont les Italiens et les Français comprennent le bonheur. Mais peut-être était-il de l’avis de Chateaubriand, qui raille ceux qui espèrent prolonger leur mémoire en attachant à des lieux célèbres un souvenir de leur passage. Un jour que l’auteur des Mémoires d’outre-tombe s’efforçait de lire un nom qu’il croyait reconnaître sur les murs de la villa Adriana, un oiseau s’envola d’une touffe de lierre et fit tomber quelques gouttes de la pluie passée: le nom avait disparu... Le seul endroit de la maison qui ait été absolument respecté, c’est la petite bibliothèque, tout à côté de sa chambre à coucher, où Pétrarque aimait à se retirer. Là, il était tranquille et isolé. Il échappait aux importuns, aux visiteurs, à tous ceux qui interrompaient ses travaux. « Lire, écrire, méditer sont encore, avoue-t-il, comme dans ma jeunesse, ma vie et mon plaisir. Je m’étonne seulement, après un tel labeur, de savoir si peu. » Il sent que les heures comptent double et le pressent. « Il faut que je me hâte... il sera temps de dormir quand je serai sous - 48 -