LA COURONNE DE VENISE léger, que je n’ai nulle hâte d'arriver. Une fois encore, je goûte ces heures d’Italie où, libre de soucis, et loin des voies trop fréquentées, je n'ai qu’à jouir de la vie. Tout rit autour de moi, la campagne fertile, les pampres dorés, les gens au seuil des fermes, les enfants qui jouent dans les fossés. En parcourant un guide local, je lis une page de Luigi Cornaro qui déjà, au xv8 siècle, célébrait la joie de cette contrée qu’il appelle le pays dcir allegre\\a e del riso. A Baone, la route fait un grand détour et offre une vue splendide sur Este; puis, au croisement du chemin de Monselice, elle vire brusquement vers le nord et se dirige droit sur Arquà dont on commence à distinguer les maisons. Un vieux clocher se détache sur le ciel, dans un nid de verdures. Au-dessus, se dresse le cercle des collines Euganéennes, tantôt arrondies comme les ballons de nos Vosges, tantôt pointues et aussi régulières que des pyramides. Quelques cônes tronqués, rappelant les montagnes d’Auvergne, m’expliquent la comparaison qui vint naturellement à l’esprit de M. Pierre de Nolhac quand il fît ce même pèlerinage : Ma Limagne courbe des lignes Pareilles sur ses horizons; Les collines sont moins insignes, Mais elle y mêle aussi les vignes Et les profondes frondaisons... — 40 —