LA COURONNE DE VENISE ladio, en effet, malgré son amour des voyages (il étudia sur place la plupart des monuments antiques de Rome, Ancône, Pola, Spalato, Ravenne, Suse et même de Nîmes), réserva presque exclusivement son génie pour une ville si apte à le comprendre. En dehors de Vicence, de Venise, — qui lui doit le Rédempteur, San Giorgo Mag-giore et la façade de San Francesco délia Vigna, — et de la Vénétie où il construisit quelques villas, on peut dire qu’il n’existe aucune œuvre importante de Palladio. Vicence suffit à son activité : jamais cité ne fut mieux préparée à comprendre un homme, ni artiste mieux destiné à être compris par elle. Sa mort fut un deuil unanime. La poétesse Isicratea Monti composa un sonnet où elle déclarait que Palladio avait été appelé dans la patrie éternelle «pour la faire plus belle». Rien de plus puéril que le racontar dont le président de Brosses s’empressa de se faire l’écho. « Palladio, dit-il, ayant reçu quelque mécontentement de la noblesse de sa ville, s’en vengea en mettant à la mode le goût des façades dont il leur donnait des dessins magnifiques qui les ruinèrent tous dans l’exécution. » Le goût pour l’architecture persista à Vicence après Palladio dont l’enseignement fut la meilleure garantie contre les excès du baroque. Grâce à lui, se conserva ce sens des proportions qui est si caractéristique dans la plupart des monuments de la Haute-Italie. C’est à peine — 54 —