GERMAINS ET SLAVES mais je veux aussi que dans la liste des risques de guerre on n’oublie pas les excès de cet orgueil et les menaces de cette hégémonie. De toutes les causes qui ont troublé l’Europe depuis dix ans, aucune ne fut plus fréquente que l’ambition et la brutale avidité germaniques. L’esprit d’hégémonie a si bien pénétré la politique allemande qu’elle tient pour désobéissance tout ce qui ne lui convient pas ; les changements qui ont suivi la guerre des Balkans lui sont apparus comme un trouble à l’ordre oriental que l’Allemagne avait établi et protégeait. Et nous-mêmes, d’ailleurs, nous n’avons pas apprécié fort différemment les événements de cette guerre. Nous avons parfois été desservis par ce travers, de simplifier à l’excès, faute sans doute d’informations, et les passions des peuples et les conflits d’intérêts. Il n’est pas aujourd’hui, il ne fut peut-être jamais un endroit du monde qui ne soit le lieu de rencontre de forces nombreuses et diverses. Chose curieuse, notre besoin de clarté, de brièveté latines, simplifiant à nos yeux de grands événements complexes, nous rapproche parfois des imaginations tumultueuses et vagues des Slaves exaltés. Nous sautons parfois sur les mêmes chimères. Nous voyons tout, proches des événements lointains, incertains et à peine dessinés. Dans toute cette affaire balkanique, nous avons accueilli l’image serbe des « 600.000 baïonnettes » slaves menaçant au sud les empires germains, et nous avons fait une réalité prochaine d’une formation politique que les mille forces de l’avenir peuvent détruire, consolider, modifier, retourner. Cette