LE ROYAUME DU CALICE IÇ) I bienfaits des apôtres Cyrille et Méthode, fils de Salonique, qui apportèrent, il y a dix siècles, le christianisme aux Slaves d’occident, les Tchèques rêvaient de faire pénétrer le sentiment de l’unité slave chez les Polonais et les Ruthènes, chez les Yougoslaves et jusque chez les métis bulgares. Et l’enseignement continu de l’Université tchèque de Prague était chose moins fragile qu’une embrassade de banquet ou un délire de congrès. Comme aux temps glorieux qui suivirent Charles IV, Prague menaçait de devenir l’éducatrice des Slaves, et presque tous les jeunes hommes destinés à devenir l’élite politique des Slaves du sud ont été, ces temps derniers, les élèves de Masaryk. Dans l’action politique même et le combat quotidien, c’étaient les représentants des Tchèques qui tenaient ce rôle de directeurs ou de défenseurs des Slaves. Durant toute la guerre balkanique, où l’Autriche officielle, qui n’espérait rien que des divisions des peuples de la péninsule, concentra contre leur alliance ses fureurs, son dépit et ses fourberies, c’est Kramar qui, aux Délégations, dénonçait cette mauvaise humeur belliqueuse de la chancellerie de Vienne satisfaite seulement par la déclaration de guerre de 1914» et lui opposait la politique de la Confédération. C’est Masaryk qui, pour la défense des Serbes d’Autriche et pour la honte d’un gouvernement conduit par sa police, débrouillait les intrigues, découvrait les faux, perçait les hautes complicités dans les procès d’Agram et l’affaire Friedjung. 0 trop heureuse Europe, si elle eût pu l’écouter! Car Masaryk ne faisait pas alors autre chose que de mettre son pied sur la mèche allumée