l8o DE LA SUCCESSION d’aUTRICHE animaient de la même flamme le peuple qui triomphait toujours de ses propres divisions devant la menace de l’ennemi : « L’Église a lancé contre nous nos ennemis naturels, les Allemands », disait le manifeste de Prague de i4i6. Quels souvenirs dans la mémoire du peuple que ceux de ce temps où l’Allemagne trembla devant le Calice ! Car ces hérétiques, qui n’avaient point de théologie propre, voulurent avoir un symbole et choisirent celui de la communion sous les deux espèces, le Calice, qui remplaça aux pinacles de toutes les églises de Bohême le symbole de la Croix. De guerre lasse, après vingt années de lutte, l’Empire et l’Église cédèrent devant le Calice. Mais les passions religieuses s’éteignirent lentement et la défaite de la Montagne Blanche acheva d’abattre les résistances nationales. Sous les exorcismes habiles et patients des Pères de la Compagnie de Jésus, les ombres mêmes de Jean Huss, de Zizka et de Podiébrad s’enfuirent de la mémoire des hommes, et nul ne se trouva plus pour parler à l’humanité de la gloire et de l’esprit du royaume du Calice, plus mort et mieux enseveli que ne pouvaient l’être à ce moment les empires de Chaldée ou d’Assyrie. Les officiers français de l’armée du maréchal de Belle-Isle, qui firent au dix-huitième siècle en Bohême une retraite célèbre dans l’histoire militaire, ne virent en ce pays qu’un peuple ignorant, ne connaissant que son patois, soumis à l’Empire et docile à ses maîtres jésuites.