LE ROYAUME DU CALICE 187 esprit national, il faudrait ou maintenir l’Autriche avec eux ou faire le Mitteleuropa contre eux. Il s’entretenait avec Kramar, conseillait de ménager les Tchèques et condamnait les persécutions. Le premier ministre, comte Stürgkh, était son ami et docile à ses avis. Mais Stürgkh pensait timidement et agissait plus faiblement encore. Sur les choses de Bohême, il suivait Thun ; sur les choses de Moravie, province plus tchèque encore que la Bohême, puisqu’elle n’a pas de « confins » allemands, il suivait le gouverneur von Bleyleben, très germanique celui-là ; sur les affaires hongroises il suivait von Spitzmüller qui suivait Tisza. En ces temps violents, ce premier ministre autrichien, administratif et paisible, était de la race des victimes. Le compromis de guerre du comte Thun dura autant que son gouvernement. Un coup de poing sur la table de l’archiduc Frédéric, général en chef dérisoire d’une armée asservie, mit ordre à toutes ces affaires. Il exigea l’arrestation et le procès de Kramar et la terreur même en Bohême. Dès lors, tout devint clair, les partis tchèques se réunirent, et les socialistes mêmes, toujours un peu apparentés dans l’Europe Centrale aux « Genossen » germaniques, rejoignirent le peloton national. Ce peuple a son union sacrée tournée tout entière contre l’Allemand (■). L’Allemand le leur rend bien. L’instinct si clairvoyant de la haine les anime l’un contre l’autre et, (i) 11 faut excepter le député Tobolka, qui a publié un livre bien singulier, Das Böhmische Volk, célébré dans toute l’Allemagne et la Hongrie.