LE PRÉTENDANT — MITTELEUROPA I27 Le parti du Mitteleuropa a le pangermanisme modeste. Il n’engloutit que la moitié de l’Europe et l’Asie antérieure : c’est la plus petite taille. L’évangile en fut donné au peuple allemand en octobre 1915 par le pasteur Friedrich Naumann, député au Reichstag, en un livre paru sous ce titre : Mitteleuropa. Toute la Germanie militante, bien différente de la Germanie triomphante de 1914, a reconnu en ces trois cents pages, auxquelles elle a assuré un large succès, l’état de ses espérances rognées et de ses ambitions raccourcies. Août 1914 : « Germanisationtellurique ». Octobre 1915 : « Mitteleuropa ». L’Ancien Testament, celui qu’apportaient avec elles les troupes allemandes à la déclaration de guerre, et qui devait coucher le monde sous une domination environnée de tonnerres et de terreurs, est devenu dans le livre de Naumann une doctrine de douceur prudente et presque de sérénité. Il ne s’agit plus que de réunir les deux Empires centraux et quelques dépendances bulgares et turques en une fédération unique. Le premier corps des États-Unis d’Europe ne manquera pas sans doute d’attirer à lui, par sa séduction propre et la vertu de son régime, ses voisins encore égarés. Gloire à l’armée française ! L’univers, qui n’est pas si sot que l’avait pensé l’Allemagne dans l’attaque brusquée de sa propagande, commence à se rendre compte qu’un tel changement est dû à nos soldats. Le Mitteleuropa, c’est le pangermanisme retour de la Marne. Dès qu’il fut certain que le plan occidental était ruiné, que l’Allemagne n’atteindrait pas sur la Manche ou la côte atlantique les établissements