LES AFFAIRES DE POLOGNE 63 Voici, dans cette lutte, un fait nouveau et de conséquence : une démocratie. La plèbe polonaise, qui dans l’histoire avait éclaté en jacqueries, apparaît dans le monde politique et, sur le champ de bataille agraire, repousse l’ennemi héréditaire qui avait jadis refoulé son aristocratie ; elle y montre une ténacité, un esprit d’organisation, un génie rural servis par des hommes du type le plus curieux ; tel cet abbé Wawrziniak, paysan volontaire, intrépide et sûr de soi, merveilleux organisateur de caisses rurales, trésorier de village reconnu comme l’un des premiers financiers de l’Europe. Elle a maintenu, chose incroyable dans la lutte, l’union de toutes les forces polonaises. Aux récentes élections du Landtag de Prusse (mai ig13), conservateurs, nationaux-démocrates, centre, sont d’accord sur toutes les questions nationales. Au Reichstag, dans la discussion des nouveaux armements, l’opinion se soulève contre le langage trop modéré des Polonais membres de la Commission, et les mêmes Polonais, qui avaient si bien servi en 1870 à la fondation de PEmpire ('), refusent aujourd’hui, avec les seuls socialistes, l’augmentation des forces militaires. Le hobereau prussien, l’une des forces conservatrices les plus entêtées qui soient au monde, se heurte, à l’Est, non plus seulement à une opposition nationale, mais à une opposition de forme démocratique. Et cette opposition le déborde au Sud, car c’est le réveil du peuple de Posnanie qui a rendu la (1) Sienkiewicz a écrit sur ce sujet un roman émouvant : Bartek le Victorieux.