LE ROYAUME DU CALICE 177 selle. Quelque quatre-vingts ans avant que Jérôme Savonarole, de son couvent de Saint-Marc, enflammât Florence pour la même cause, un prédicateur probe et pur dénonçait à l’église de Bethléem à Prague la corruption ecclésiastique. Ce qui ne fut dans la divine cité toscane qu’une crise passagère d’élégance mystique fut pour la solide race tchèque une longue et rude épreuve qui marqua pour toujours la conscience nationale du feu terrible et purificateur de la persécution. Les Allemands, trop heureux de l’aubaine, poussèrent jusqu’à l’hérésie complète, hors de l’Eglise, nous dirions aujourd’hui hors de la civilisation, le prédicateur de Bethléem, Jean Huss, que la chrétienté œcuménique fit brûler à Constance. Huss fut un médiocre théologien. J’en suis mauvais juge, mais je m’en rapporte sur ce point à M. Ernest Denis ('), le premier des historiens de la Bohême après François Palacky. Mais la faiblesse même de l’originalité de la doctrine de Huss, adaptée de Wiclef, et de son invention théologique laisse toute sa force et toute sa place au sentiment national qu’il exprima avec éclat. En ces temps, dont l’Orient seul nous peut donner aujourd’hui quelque idée, où les questions religieuses se distinguaient mal des questions nationales, il fut l’apôtre de la nation tchèque contre la centralisation religieuse et politique, profitable aux Allemands. Transfigurée par son martyre, son image rayonna dans la conscience du peuple, dont elle souleva durant les premières années les colères (1) E. Denis, Huss et la Guerre des Hussites, page 137. SUCCESSION d’aUTRICBK ia