176 DE LA SUCCESSION d’aüTRICHE qui l’entoure et dont cette ville est le centre topographique presque exact, n’ont cessé, à travers les âges, de détester et de combattre les « muets » (*) de Germanie ; cette passion et cette fonction remplissent l’histoire de la Bohême. Cette lutte millénaire commença en des siècles confus et c’est, naturellement, le Boche qui a commencé. Les Tchèques étaient établis en Bohême depuis les migrations slaves, lorsque les Allemands achevèrent d’exterminer les Slaves de Lusace et de l’Elbe. Le Germain chez ses voisins colonise et extermine : dix peuples autour de son empire en portent contre lui le témoignage et l’accusation. Quand il parvint au cours supérieur de l’Elbe, il se heurta aux Tchèques, qui résistèrent. Cette affaire dure depuis mille ans, et nous en sommes au même point, exactement. Les Tchèques, entourés de toutes parts par le Germain et qui ne rencontrent les autres Slaves que par la pointe du plateau morave et des plaines silésiennes qui touchent à la Pologne, n’ont perdu ni un pouce de terrain ni une âme. Le quatorzième siècle vit le plus grand éclat de ce peuple : on put penser alors qu’une civilisation slave allait rayonner de Prague, capitale et métropole intellectuelle, sur l’Allemagne entière. Il y avait à Prague une université tchèque, fille de l’Université de Paris, quand Vienne ni Leipzig n’avaient encore d’enseignement. Cette nationalité si forte voulut avoir une religion nationale : elle fit une hérésie. L’hérésie fut souvent, au Moyen Age, un mouvement nationaliste contre l’Église univer- (1) « Nemci, les muets », nom donné aux Allemands dans toutes les langues slaves et orientales.