LE TRAGHETTO A A. Gilbert de Voisins. Les longues dalles sonores de l’étroite « calle » aboutissent aux planches de l’embarcadère où attendent les gondoles du traghetto San Gregorio. Elles attendent, patientes, paresseuses et engourdies, mais elles ne sont jamais tout à fait immobiles, car elles oscillent au moindre remous et, souvent, elles balancent, comme pour nous faire signe, le fer dentelé de leur proue. J’obéis, et me voilà assis sur le tabouret de cuir noir. La gondole démarre à reculons, puis, doucement, elle vire. A la poupe, l’homme rame. Il a derrière lui le décor de marbre de la Salute, puis sa stature se détache sur l’eau et le ciel jusqu’à ce qu’elle se dresse sur le fond romantique des palais de la rive que l’on aborde au campo San Zobenigo où je débarque sous la petite treille à feuilles recroquevillées, en prenant bien garde 55 —