VENCRIER ROUGE mémoire. Il y ranime des échos engourdis. Entre eux, ils s’appellent, se répondent, se mêlent, s’unissent en une harmonie grave et lointaine. Ils m’emplissent, débordent, m’environnent. Toute la chambre est comble de leur rumeur. Et je la reconnais, cette rumeur qu’a suscitée en moi le branle de la petite clochette, et voici que, les yeux fermés, le cœur ému, je m’abandonne à son sonore enchantement. Et je vous reconnais, cloches délicieuses et diverses, cloches de Venise, cloches de bronze, d’or et de cristal que j’ai tant de fois entendues, vous qui, du haut des campaniles, retentissez chaque jour dans l’air marin et dont les voix descendent sur les « campi » déserts, chantent au tournant des « calli » étroites, se répercutent à l’angle de « rii », ô vous, cloches vénitiennes, cloches de San-Marco et de la Salute, cloches des Frari et de San-Giovanni e Paolo, cloches des Gesuati et de San-Sebas-tiano, et vous, cloches de San-Giorgio Maggiore et de la Giudecca, cloches des îles de la lagune, vous qu’a ramenées jusqu’à moi votre sœurette minuscule, car c’est elle qui est allée vous chercher là-bas et qui vous a con- 9 —