LE PORTRAIT A Laurent Évrard. Il est debout sur le panneau de bois où le peintre — Longhi ou l’un de ses élèves — l’a représenté de dos. C’est un personnage de l'ancienne Venise, car il en porte l’habit de carnaval. Le domino de satin blanc et la baüta de satin noir l’enveloppent tout entier, et son large tricorne se détache sur un fond de ciel bleu où se gonflent des nuages argentés, comme en mire encore l’eau des lagunes. Derrière lui, dans la vaste galerie du vieux palais, dont les fenêtres donnent sur le Grand Canal, on cause, on fume. Le thé chante dans la théière. C’est l’heure où l’on se réunit et où l’on raconte ses promenades. Celui-ci a rapporté de chez l’antiquaire ce verre irisé. Celui-là, ce carré de dentelle. Un autre nomme les « calli » et les « campi ». La gondole a suivi tel « rio ». — 33 —