IMAGES VÉNITIENNES De l’une d’elles sort assurément ce landau qui promène des dames élégantes, mais, mieux que cet attelage, j’aime cette antique carriole. On y a chargé une énorme cuve à vin, à l’intérieur de laquelle le vigneron s’est installé comme dans une niche. Il conduit un petit âne rétif qui prend peur et tourne bride. Quel drôle d’équipage! Nous en aurions ri jusqu’à Oriago, si les petits vauriens de Mira ne nous l’eussent fait oublier. Car, à Mira, toute la population se presse pour nous voir sortir de l’écluse et une bande de polissons nous suit à la course et nous accompagne de ses cris. Il y en a un, dans l’escorte qu’ils nous font, qui est vraiment prodigieux. C’est un vif petit bonhomme de sept à huit ans, maigre et hàlé et qui, tout en courant, ne cesse de parler et de gesticuler avec une extraordinaire frénésie. Un autre, qui porte ses souliers à la main, galope sur ses chaussettes, et s’arrête pour en enlever une d’abord, puis pour enlever ensuite la seconde, tandis qu’un de ses compagnons, gros et gras, aussi pieds nus, s’époumonne en faisant, à chaque enjambée, les grimaces les plus comiques. Heureusement que le souffle finit par manquer — i io —