LA BELLE DAME L’artiste qui a peint la patricienne et ses atours, d’une brosse large et un peu hâtive, a réservé sa patience pour ce détail du tableau. Là, son pinceau s’est fait minutieux et subtil, pour traiter à la loupe ce personnage minuscule. C’est un jeune homme en bel habit, au visage agréable et souriant. Ah ! comme elle le considère avec tendresse, avec amour!... De tout le passé, n'est-ce pas lui seul qu’elle regrette ! Si elle pense quelquefois à son palais de marbre et à sa villa, c’est qu’il se plaisait à l’y venir visiter; si elle songe à sa gondole, c’est qu’ils s’y étendaient côte à côte et qu’à l’abri du felze clos ils échangaient de douces paroles et des caresses aussi longues que leur souffle. Ah! si seulement elle pouvait remuer ses mains inertes et porter jusqu’à ses lèvres cette miniature où sourit son amant ! Si elle pouvait sentir à sa bouche son baiser imperceptible !... J’ai toujours aimé les vieux portraits, mais les antiquaires en demandent bien cher. J'aime les vieux portraits romanesques et qui disent des histoires de jadis, des his- — 61 —