168 DANS l’ORIENT BYZANTIN se constitua dans des conditions toutes semblables. En Syrie comme aux rivages du Bosphore, la conquête avait fait table rase du passé. Les vainqueurs organisèrent l’état nouveau dans lequel ils allaient vivre d’après le seul modèle qu’ils connussent, celui que leur offrait la France féodale du douzième siècle : d’un seul coup ils transportèrent en Orient toutes les lois, toutes les coutumes de l’Occident. Le régime qu’ils instituèrent du droit de la victoire, sans nul souci, ou presque, du passé, ce fut dans son expression la plus pleine, — et par là la plus instructive pour nous — la pure féodalité. Nulle part non plus, mieux qu’en cet empire latin de Constantinople, on ne trouve un meilleur exemple pour illustrer un des phénomènes les plus intéressants que l’histoire puisse offrir : le contact entre deux grandes civilisations et les réactions qu’elles exercent l’une sur l’autre. Le grand événement de la quatrième croisade mit en pré sence, une fois de plus, les barons d’Occi-dent, fiers soldats un peu rustres et les Grecs ingénieux, raffinés et subtils : ainsi il nous laisse voir — et ce n’en est pas assurément le moindre intérêt — quels échanges d’idées et de mœurs se firent alors entre deux sociétés longtemps étrangères et pro-