DANS L’ORIENT BYZANTIN C'est pour cela aussi que les Turcs ne l’aiment point. Antérieure à l’Islam, antérieure à la conquête, Sainte-Sophie, dans Stamboul musulmane, est le souvenir et le symbole d’un autre passé. Le nom même — Aya Sofia — qu’elle a conservé jusque parmi les musulmans, rappelle le temps où Constantinople n’était point une capitale ottomane ; et on a eu beau couronner sa coupole d'un croissant, sur son dôme byzantin l’orthodoxie entière voit toujours flotter la croix d’or du Christ. Et c’est pour cela que, tandis qu’ils entretiennent avec soin les grandes mosquées de l’Islam, les Turcs considèrent Sainte-Sophie avec quelque indifférence et la conservent négligemment. Or, depuis près de quatorze siècles qu’elle se dresse sur le sol de Constantinople tant de fois ébranlé par les tremblements de terre, la Grande Église, tant de fois réparée, restaurée, a perdu quelque chose de sa solidité première. Il faut le dire avec une franchise brutale, Sainte Sophie, aujourd’hui, menace presque ruine, et de cette ruine menaçante beaucoup ne prennent que peu de souci. On a, je le sais