l’empire LATIN DE CONSTANTINOPLE 195 saient-ils pas d’eux-mêmes : «Nous sommes gens qui allons pour conquêter »), se mirent en route le long de la côte d’Achaïe. Tout le Nord se soumit sans peine; l’Arcadie centrale ne résista guère davantage. Les seigneurs grecs du pays s’accommodaient assez bien avec des hommes qui, par plus d’un trait, leur ressemblaient; et le peuple ne demandait qu’à changer de maîtres. En quelques semaines, presque sans batailles, le Péloponèse entier était aux mains des Francs. De cette étonnante aventure naquit, la principauté d’Achaïe, c’est-à-dire ce qui fut, dans l’empire latin de Constantinople, le résultat durable de la croisade de 1204. Sous les trois Villehardouin, qui la gouvernèrent de 1209 à 1278, la Morée fut en effet un état riche et prospère. La cour d’An-dravida « était plus brillante que celle des plus grands rois »rLes princes y entretenaient une suite nombreuse de chevaliers à éperons d’or, et la renommée en était telle, que de l’Occident lointain, en particulier de la Bourgogne et de la Champagne, les jeunes gens s’empressaient à venir servir des maîtres magnifiques et généreux. Autémoignage d’un contemporain, la cour de Morée était « le meilleur séjour de chevalerie ». Les finances de la principauté étaient excellentes,