mi HISTOIRE DE VENISE. dans scs fonctions, et continircllement surveillé dans sa vie domestique, enfin à qui,on avait interdit jusqu’à la faculté de donner sa démrssimi. Il avait, comme les rois de Sparte, la majesté d’un roi et l’autorité d'un citoyen. La dignité de doge fut toujours élective; on pou- , vait y être appelé sans siéger actuellement dans les conseils, sans y avoir même jamais siégé. Le peuple eut plus ou moins de part à cette élection, suivant les progrès que le gouvernement fit vers l’aristocratie. J’ai indiqué comment il en fut entièrement dépouillé. Beaucoup de doges s’arrogèrent le droit de se donner un adjoint pendant leur règne; presque toujours cet adjoint fut nommé dans les mêmes formes que le doge lui-même; quelquefois le doge le nomma de sa propre autorité; jamais il ne fut choisi hors de la famille du prince; ce fut toujours un fils, ou au moins un frère du doge régnant. L’histoire de la dignité ducale pourrait se diviser en trois périodes. La première, de l’an G97, époque à laquelle on rapporte la création du dogat, jusqu’au commencement du onzième siècle, vers l’an 1032. Dans cet intervalle de plus de trois cents ans, les doges, quoi qu’en aient dit les historiens vénitiens, qui, par respect pour le gouvernement aristocratique, voudraient le faire remonter à l’origine de Venise, les doges, dis-je, étaient de véritables souverains faisant la paix et la guerre, commandant les armées, choisissant leurs conseillers, nommant à tous les emplois, désignant souvent leur fils ou leur frère pour leur successeur. Il ne parait pas qu’ils lissent des lois; mais ils rendaient la justice. On appelait à eux de tous les tribunaux ; ils avaient le droit de faire grâce. La seconde époque commence avec le onzième siècle, cl finit vers le milieu du treizième. Les doges ne pouvaient plus avoir un adjoint, on leur donnait des conseillers ; ils étaient obligés de porter les affaires à la délibération d’un sénat; mais ce sénat ils le convoquaient, le composaient à leur gré. Le nom que ce sénat avait conservé (les pregadi) atteste qu’on n’y prenait place que quand on en était prié par le prince. Les doges ne désignaient plus leurs successeurs, mais ils procuraient à leurs fils des établissements qui étaient en quelque sorte une souveraineté. Les lies de Cherzo et d'Ozero se donnèrent, dit-on, en 1018 à la république : en 1130, Guido Polani, fils du doge qui régnait alors, fut proclamé comte d’Ozero. Vers 11156, un fils du doge Vital Michieli reçut le même honneur. De 1180 à 1304, la famille Alorosini posséda celte ile, comme comté héréditaire qu’elle avait acquis de la maison Michieli par un mariage. Ce ne fut qu’à la mort de Marin Morosini, que la république se chargea d’envoyer, tous les deux ans, dans cette ile, un magis-| trat, à qui on conserva le titre de comte. Quelque-| fois, en l’absence du doge, l’autorité ducale avait été exercée par son fils. On en a vu l’exemple au départ de Vital Michieli II pour la guerre contre Manuel Comnène, et de Henri Dándolo, pour la | conquête de Constantinople. Dans les temps postérieurs, le doge était remplacé, en cas d’absence, par le plus ancien de ses conseillers. C’est à partir du treizième siècle que commence un nouvel ordre de choses : un sénat, un grand-conseil, existent nécessairement et se renouvellent, d’abord par élection; ensuite le grand-conseil devient permanent, héréditaire, souverain, et dès-lors le doge n’est plus que le premier magistrat de la république. A chaque vacance, on ajoute à son serment des formules qui restreignent son autorité; et le livre où on enregistre successivement tout ce qui lui est ordonné, tout ce qui lui est interdit, devient, sous le litre de promissions ducales, le texte du contrat fait à chaque mutation, entre la république et le personnage élu pour la représenter. Dès le milieu du treizième siècle, on l’oblige de jurer qu’il ne cherchera à étendre, par aucun moyen, l’autorité qui lui est confiée; qu’il dénoncera lui-même ceux qu’il saurait en avoir conçu le projet; qu’il gardera le secret des affaires traitées dans les conseils; qu’il n’ouvrira, ne lira aucunes lettres des cours étrangères, hors de la présence de scs conseillers; que sans eux il n’expédiera aucune dépêche aux légations, ne donnera aucune audience aux ambassadeurs, et ne leur fera aucune réponse avant qu’elle n’ait été délibérée ; que sa famille ne pourra accepter aucun bénéfice ecclésiastique, ni exercer aucun gouvernement, soit dans Venise, soit au dehors; que ses fils seront exclus de toutes missions à l’étranger; qu’ils ne pourront être électeurs; qu’il ne recevra aucun don, aucun hommage de ses serviteurs, même des populaires. Dans le quatorzième et le quinzième siècle, on lui interdit de sortir de Venise sans permission ; d’exercer le commerce par lui-même, par sa famille ou par scs serviteurs ; d’èlever, de réparer de ses deniers des monuments publics; de posséder des immeubles hors du dogado; de s’arroger aucune influence dans les délibérations, sa voix ne devant avoir aucune prépondérance. On interdit à ses fils et à ses neveux le droit de faire des propositions dans les conseils; on les déclare incapables de siéger dans le collège. Pendant le seizième et le dix-septième siècle, on resserre encore ses chaînes. Il ne peut plus recevoir, dans scs appartements privés, ni les ministres étrangers, ni leurs agents, ni même les chefs des troupes