LIVRE XL. 321 à l’exemple de Clairaut, de Mairan et de d’Alcm-berl, venait de combler d’éloges les ouvrages du géomètre-métaphysicien Jacques Belgrado d’Udine, que l’académie des sciences do Paris avait admis parmi ses associés : Jean Poleni, que j’ai déjà nommé, remportait trois fois les prix décernés par celle académie : l’université d’Oxford rendait un bel hommage à un géomètre véronais, en faisant imprimer magnifiquement le grand ouvrage de Joseph Torelli, intitulé l’Archimède : le père Ricali, jésuite, dont la famille a été pour l’Italie ce que celle des Bernouilli étail pour la Suisse (1), publiait sur le calcul intégral un traité dont la république voulut constater le succès par une médaille; et, ce qui est plus glorieux encore, il inventait une formule à laquelle on a donné son nom, honneur déféré à un très-petit nombre de géomètres, Newton, Cotes, ïaylor, Bernouilli. Quelques années après, Laurent Mascheroni, auteur de la Géométrie du compas, venait prendre place parmi cette réunion des hommes les plus savants de l’Europe, convoqués à Paris pour déterminer un système universel des poids et mesures. Dans les sciences naturelles, Venise compte au premier rang Jérôme Allegri ; un siècle plus lard, Louis Locatelli, et Ange Salo, qui préparaient la voie, par leurs expériences, à ceux qui, depuis, ont créé la science de la chimie, et parmi lesquels on a compté dans ces derniers temps l’auteur des Principes de la science pliysico-chimique appliquée à la formation des corps et aux phénomènes de la nature, un Dandolo, que les Berthollet, les Guyton-Morveau, les Fourcroy, annoncèrent comme destiné à reculer les bornes de la science. M. Berthollet, dans un mémoire sur l’acide prussique, a.déclaré que le P. Alexandre Barca de Bergame l’avait prévenu dans sa découverte de la décomposition de l'alcali phlogistiqué. Outre ces noms, Venise peut citer avec orgueil Vitaliano Donati, qui écrivit l’histoire naturelle de la mer Adriatique ; les botanistes Louis Anguillara et Prosper Alpini, qui fit un voyage en Egypte, pour en observer les végétaux; enfin Albert Forlis, Antoine Ricci Zanoni, tous deux de Padoue, tous deux également connus, l’un comme naturaliste, l'autre comme géographe, et l’abbé 01 ivi de Chiozza, auteur de la zoologie adriatique, enlevé dès sa jeunesse aux principales académies de l’Europe, qui s’étaient empressées de se l’associer. L’école de Padoue fut de tout temps célèbre par (1) 11 était de Castel-Franco. Le comte Jacques, son père, se fit connaître par divers ouvrages sur les mathématiques, en 4 vol. in-f°. Le gouvernement vénitien l’appela à une chaire dans l’université de Padoue. La cour de Vienne lui offrit le titre de conseiller aulique; celle de Pétersbourg, la HISTOIRE UF. VENISE.—T. II. les savants médecins qu’elle a produits. Je me bornerai à citer, dans le quinzième siècle, Jean Bage-lardo,et Jean-Baptistc Monti, dont l’il lustre de Thou a consigné l’éloge dans son histoire, et Gabriel Zerbi de Vérone, dont le savant M, Portai a analysé le traité anatomique, où il fait remarquer plusieurs découvertes. NicolasLeoniccno de Vicence traduisit Galion, et André Mongaio de Bellunealla vivre chez les Arabes pour étudier leur langue, et se mettre en état de publier une traduction des ouvrages d’A-vicène, qu’il enrichit d’un commentaire. Le seizième siècle vit lleurir Aldrighetti, Jean Aquila, Jean Morconaja, Michel-Ange Biondo, et ce même Alpini, déjà nommé parmi les botanistes, que son traité des pronostics de la mort plaça à la tête de tous ses contemporains, dans l’art des observations médicales. Enfin, vers le milieu du siècle dernier, la patrie des Tiraboschi et des Mascheroni, la ville de Bergame, put s’enorgueillir d’avoir vu naître un médecin célèbre dans toute l’Europe, André Pasta, contemporain de Dominique Santorini et de Jean-Baptiste Morgagni, qui a fait faire tant de progrès à l’anatomie. Quoique l’université de Padoue n’cùt pas moins de sept chaires de théologie, l’esprit du gouvernement, qui ne laissa jamais naître aucune dispute sur le dogme, était peu favorable à cette science. Il y eut quelques savants prélats, comme les cardinaux Louis üonato et Pierre Morosini au quinzième siècle, et le cardinal Jean-Jérôme Albani dans le siècle suivant; mais le haut clergé était circonspect, celui du second ordre corrompu et par conséquent ignorant et avili, les moines affranchis de l’autorité épisco-pale étaient sous la surveillance des magistrats; aussi les prêtres vénitiens parurent-ils avec peu d’éclat dans les conciles, dans la controverse et dans la chaire. 11 y avait cependant une partie du droit canon que l’on étudiait avec soin. Déterminé à repousser toutes les usurpations de l’autorité pontificale sur la puissance temporelle, le gouvernement vénitien avait toujours soin de donner à sa résistance des formes graves et méthodiques. La cour de Home élevait-elle une prétention nouvelle : on commençait par faire consulter les lois canoniques, et on attendait l’avis des théologiens, comme si la délibération du sénat eût dù en dépendre. Mais la république avait des consulteurs en titre, choisis ordinairement parmi les hommes d’un vaste savoir et d’un esprit clevé. Tel fut le fameux religieux ser- direction des études. 11 eut trois fils : en 1707, Vincent (c’est le jésuite) ; en 1710, le comte Giordano ; et en 1719 , François; connus l’un et l’autre par de nombreux ouvrages, qui traitent principalement de l’architecture. 21