336 HISTOIRE DE VENISE. intention n’est point que leur palais serve d’asile aux personnes poursuivies par la justice. Le présent arliclescra lu à chacun de nos ambassadeurs au moment de son départ, et l’observation lui en sera rigoureusement recommandée. 23° Il arrive quelquefois que, pour se conformer aux lois dans la punition des délits graves, on prononce la confiscation des biens, en moine temps que le bannissement, contre des sujets des provinces de terre-ferme, gens de capacité et do considération, qui se sont montrés à la tête d’un parti, ou qui ont auparavant rempli des emplois militaires de quelque importance. Ces exilés, privés de toutes leurs ressources, sont réduits à aller chercher du service ailleurs. Il peut n’être pas indifférent aux intérêts de la république que ces condamnés, bien que proscrits et odieux, se fixent dans un pays plutôt que dans tel autre, c’est-à-dire chez le prince le mieux disposé pour nous, le plus éloigné de nos frontières et le moins porté à élever des prétentions sur notre territoire. En conséquence, lorsque le cas se présentera, en prononçant le bannissement du coupable, il faudra lui laisser une voie ouverte pour qu’il puisse implorer la miséricorde du gouvernement, et connaître nos intentions sur le choix du lieu où il serait vu avec moins d’animadversion de la part de la république. Alors nos successeurs, après avoir mis dans la balance l’importance du condamné et sa fortune, pourront lui accorder une partie du produit de ses biens, qui n’excédera jamais le tiers, sous la condition de résider dans les États d’un prince qu’on lui désignera; mais en fournissant une caution qui garantisse la restitution de toutee qui lui aura été payé, s’il sort du lieu qui lui aura été assigné. Dans le cas où il se verrait dans la nécessité de changer de résidence, il devra préalablement en solliciter et en obtenir la permission. Tous les ans, à l’époque où il aura à recevoir la portion du revenu qui lui aura été accordée, il devra justifier de la continuité de sa résidence. Sont exceptés de toutes les dispositions ci-dessus les condamnés dans la sentence desquels il est énoncé qu’on réclamera leur extradition, afin que, ramenés sur le territoire de la république, ils subissent la peine capitale en expiation de leur crime. Pour ceux-là on ne pourra point revenir sur la confiscation. Quant aux États qui pourraient être assignés pour résidence aux autres, on choisira entre l’Angleterre, la Hollande, la Suisse, toutes les villes libres de l’Allemagne, la Pologne, la Suède, le Danemarck, et en général toutes les puissances qui ne possèdent rien en deçà des monts. 24° Nos prédécesseurs, par l’article 34 de leurs statuts, ont défendu à tous les représentants du gouvernement dans les provinces, d’épouser, ou de faire épouser à leurs frères ou neveux, une fille noble des villes où ils exercent leurs fonctions. Il a été aussi arrêté que ceux qui aspireraient à former une alliance semblable devront d’abord attendre l’expiration de leur mission, et, après leur retour dans la capitale, présenter une requête pour obtenir l’autorisation du tribunal, qui ferait appeler la personne demandée en mariage, et ses plus proches parents, et s’informerait si les uns et les autres ont consenti librement à cette alliance, pour accorder ensuite la permission demandée, s’il y avait lieu. Toutesccsdispositionssontfortsalutairesctdignesde la sagesse du gouvernement de la république; cependant on n’a pas prévu un cas où la prudeuce du tribunal pourrait être en défaut ; c’est celui où le fonctionnaire, pendant la durée de sa mission, aurait déjà, soit par violence, soit par séduction, abusé de la personne demandée en mariage. 11 n’est pas douteux que, dans une circonstance semblable, la future épouse et scs parents ne manifestassent le désir de voir le mariage s’accomplir, pour effacer la tache dont la personne serait déjà souillée; de sorte que ceneserait qu’un consentement forcé, comme un engagement contracté sous peine de la vie. En conséquence le tribunal arrête, par supplément à l’article 34, que dans ce cas, malgré l’accomplissement de toutes les conditions exigées par les anciens statuts, la permission de mariage ne pourra être accordée, si on découvre qu’il y a eu commerce entre les futurs époux. Au contraire le fonctionnaire sera rigoureusement puni, quand même il n’y aurait pas de réclamation de la part de la partie intéressée, attendu que l’offense commise envers la dignité publique, et l’abus d’autorité dont se serait rendu coupable le fonctionnaire qui aurait été le corrupteur de ses administrés, au lieu d’en être le protecteur, suffisent pour motiver cette punition. 23° Si la volonté de l’homme n’était pas changeante jusqu’à la mort, si on n’en avait pas de fréquents exemples dans toutes les professions, si on n’avait pas vu les personnes les plus pieuses se transformer en détestables hérésiarques, il ne serait peut-être pas nécessaire que notre tribunal conservât quelque méfiance de la fidélité des patriciens qui, après avoir été tentés au nom de quelque ambassadeur pour trahir les secrets de la république, sont venus en faire leur déclaration. On pourrait croire que le métal une fois essayé n’a plus besoin d’être soumis à de nouvelles épreuves; mais le mensonge prend souvent l’apparence de la vérité, et souvent la chose après laquelle on aspire est celle qu'on feint de ne pas désirer. Il n’y a que Dieu qui lise dans l’âme des hommes. En conséquence le tribunal arrête qu’à l’avenir, lorsque quelque noble viendra nous révéler une tentative de séduction