218 HISTOIRE DE VENISE. LIVRE XXXVII. CAMPAGNES DU GÉNÉRAI, BONAPARTE EN ITALIE. — RÉVOLUTION A BERGAME ET A 11RESCIA.— 1NSURIIECTION DE LA POPULATION DES PROVINCES VÉNITIENNES CONTRE LES FRANÇAIS.— MASSACRE DE VÉRONE.— SIGNATURE DES PRÉLIMINAIRES DE PAIX A LÉOBEN. AVRIL 1796-MAI 1797. I. Au moment où le prince quittait cette terre inhospitalière, les hostilités recommençaient dans les Alpes. De part et d’autre, on avait employé l’hiver à renforcer les moyens d’attaque et de défense. L’armée française, au mois d’avril 179C, était forte, en y comprenant tous ses corps détachés, même ce qui était en Provence, de soixante-trois mille cinq cents hommes. Ceux qui ne paraissent pas avoir exagéré la force de l’armée opposée, la portent à trente-six mille Piémontais, quarante mille Allemands, et quatre ou cinq mille hommes de cavalerie napolitaine. Des deux côtés, on avait changé le commandant en chef. Le général lleaulieu était venu remplacer le général Devins; et le gouvernement français avait confié son armée au général Bonaparte, qui, en partant, avait dit à l’auteur de cette histoire : « Dans trois mois je serai à Milan ou à Paris. » On ne peut pas s’attendre à trouver ici un récit, ni même un tableau de cette guerre mémorable; mais une notice rapide est nécessaire, pour faire sentir l’influence de ces événements, qui tous, allant retentir au cœur de la république de Venise, ne pouvaient manquer d’influer sur ses délibérations et scs destinées. L’avantage des Français consistait en ce qu’ils avaient affaire à une armée qui avait deux intérêts divers : les Sardes devaient se proposer pour objet principal la défense du Piémont ; les Autrichiens la conservation du Milanais. Il parait que ce fut sur cette circonstance que le général français arrêta le plan de ses opérations. Arrivé à Nice dans les premiers jours d’avril 1796, il porta sur-le-champ son quartier-général à AI-benga, sur le bord de la mer, et poussa des troupes jusqu’à Voltri, c’est à-dire à six lieues de Gênes. Ce mouvement, qui menaçait une ville importante, où une insurrection populaire pouvait faciliter l’entrée des Français, devait donner de l'inquiétude au général autrichien, qui, en effet, le 9 avril, vint attaquer les troupes françaises dans cette position. Elles firent une résistance assez vigoureuse pour l’arrêter; et dans la nuit, dérobant leur mouvement à l’ennemi, elles vinrent se réunir au centre de l’armée, postée sur les hauteurs de Savone. Dès qu’ils se furent aperçus de ce départ, les Impériaux avancèrent de hauteur en hauteur, culbutant tous les détachements français, jusqu’à ce qu’ils fussent arrivés à une dernière redoute que le colonel Rampon gardait avec quinze cents hommes. Cet officier, électrisant sa troupe par son exemple et par le serment qu’il lui fit prêter de se défendre jusqu’à la mort, arrêta les Autrichiens pendant toute la journée du 11. La division française du général Laharpe s’avança pour le soutenir. Pendant ce temps-là, l'aile gauche, commandée par le général Masséna, fit une marche sur les derrières de l’ennemi et le prit en flanc à la pointe du jour, au moment où il venait recommencer ses attaques sur la redoute. Ainsi l’armée française avait tourné autour de ce pivot que formait la redoute, dérobant sa droite cl prolongeant sa gauche le long de la colonne autrichienne. Ébranlée par cette attaque imprévue, celle-ci fut obligée de se retirer avec perte d'un millier d’hommes tués et de deux mille prisonniers. Cette hauteur, sur laquelle on avait combattu,