516 HISTOIRE DE VENISE. qui avait l'ait du silence l’un des dogmes de sa politique, ait vu naître, de son aveu, dans sa capitale, une des inventions qui favorisent le plus la liberté des peuples, et qui leur font contracter l’habitude déjuger les actes de l’administration. C’est à Venise que parurent les premiers journaux, au commencement du dix-septième siècle. Les affaires d’Italie, les guerres avec les Turcs, intéressaient toute la chrétienté. Venise était le point où arrivaient les nouvelles du Levant, et souvent le théâtre des négociations. Un de ses citoyens imagina de mettre à contribution la curiosité publique, en distribuant des feuilles imprimées que l’on se procurait moyennant une gazette, petite pièce de monnaie qui avait cours alors. Cette monnaie donna son nom à ces feuilles. Il est plus que probable qu’elles étaient rédigées avec toute la circonspection naturelle au gouvernement vénitien; mais elles n’en donnèrent pas moins naissance à ces écrits pério-diquesqui, bientôt après, parurent dans toute l’Europe, et dont l’inlluence ne saurait être contestée. A mesure que, grâce aux progrès de l’imprimerie, les manuscrits devenaient moins nécessaires, on en sentait mieux le prix ; on les observait avec plus de soin ; on jugeait mieux s’ils étaient précieux ou vulgaires. Guarino de Vérone, déjà fameux par tant de découvertes, eut le bonheur de trouver ce qui nous reste des poésies de Catulle, son compatriote. Un autre Véronais, nommé Joconde, que nous avons eu occasion de citer comme géomètre et comme ayant construit un pont à Paris, y trouva un manuscrit qui contenait toutes les lettres de Pline le jeune , les copia , et s’empressa de les envoyer à Alde-Manuce qui en lit une belle édition en 1508. Longtemps après, dans le dix-septième siècle, on découvrit, dans la bibliothèque d’un savant de Trau en Dalmatie, un manuscrit portant la date de 1423, qui contenait le fragment connu aujourd'hui sous le nom de Festin de Trimalcion, que la plupart des critiques attribuent à Pétrone. Ce sont de ces découvertes dont 011 peut se féliciter plutôt que se glorifier; mais il en est d’autres auxquelles le hasard a eu moins de part, et les Vénitiens peuvent en citer plusieurs, dont nous jouissons peut-être sans nous informer à qui nous en devons la reconnaissance. S’ils ne peuvent revendiquer la découverte de l’imprimerie, ils prétendent l’avoir préparée par l’invention du papier, qui précéda à peu près d’un siècle celle des caractères gravés et mobiles. Quant aux inventions qui appartienent plus spé- mande de l’ambassadeur de Fiance, un écrit intitulé : Conslderazioni poliliche supra la célébré conferenza U'Hufainl’ontanablo,da!yrandeEnricol!'} di l'rancia, cialement aux sciences, je me bornerai à indiquer les principales, en commençant par les découvertes géographiques, parce qu’elles sont les premières dans l’ordre des temps. Le plus ancien comme le plus célèbre des voyageurs vénitiens est ce Marc I’ol, qui, vers le milieu du treizième siècle, parcourut l’Asie. Il la décrivit, mais non pas avec cet esprit de méthode et d’observation qui suppose d’exactes connaissances. Cependant ce voyageur y fit un si long séjour, il traversa tant de fois ce vaste continent par des routes diverses, que sa relation, tout imparfaite qu’elle est, n’en donna pas moins des notions fort importantes sur ces contrées; et l’on conservait dans la bibliolhèque de Murano, depuis le treizième siècle, dit-on, un planisphère, qui prouve qu’on avait alors une idée assez exacte de la configuration des empires de l’Asie, de ses côtes, et même de l’archipel des Indes. Cette mappemonde, qu’on peut voir aujourd’hui à la bibliothèque de Saint-Marc, était l’ouvrage d’un savant cosmographe nommé le frère Mauro, religieux du couvent des Camaldules de Saint-Michel, près Venise. On en fournissait des extraitsaux voya geurs, et le roi de Portugal, Alphonse IV, en fit demander une copie, qui lui fut envoyée vers l’an 1459. Ou montrait dans la bibliothèque de ce couvent le compte des dépenses que cette copie occasionna, et ce compte est de la main du cardinal Giraldo , qui avait été abbé de ce monastère de 1448 à 1466. Ainsi, quand même l'existence de celte mappemonde ne remonterait pas jusqu'au xtn” siècle, il n’en demeurerait pas moins constant que lesVénitiens en auraient donné communication au gouvernement portugais, trenle ou quarante ans avant la découverte du cap de Bonne-Espérance. Ils ne prévoyaient pas alors combien cette découverte devait leur être fatale. Dans les premières années du siècle suivant, eu 1521, un autre Vénitien, d’un nom illustre, Marin Sanulo, présenta au pape et adressa aux principaux souverains de l’Europe, un ouvrage intitulé : Les secrets des fidèles de la croix, dont l’objet était d’indiquer les moyens de reconquérir la Terre-Sainte. L’entreprise était susceptible de beaucoup d’objections, mais l’ouvrage n’en contenait pas moins une description très-exacte de PÉgypte, de la Syrie et de la Palestine. L'auteur avait passé une partie de sa vie dans ces contrées, et en 1521, il déploya devant le pape Jean XXII des cartes certainement les moins défectueuses qu'on eut pu avoir jusqu’alors. in difesa délia fede eaitolica e delt’ auloritù deI sommo ponteficc.