LIVRE XXXV. 177 deur de la république à Vienne, Capello, pressait son gouvernement d’embrasser la cause de la nouvelle reine de Hongrie, dont il se vantait même dans ses lettres d’avoir touché le cœur; mais les efforts de son parti furent inutiles, le sénat persista dans son système de neutralité. L’embrasement fut général ; on se battit en Si-lésie, en Bohême, en Bavière, en Italie. Je me borne à retracer rapidement ce qui, dans celte agitation de toute l’Europe, pouvait intéresser les Vénitiens de plus près. Marie-Thérèse, occupée de se défendre en Allemagne, ne pouvait guère songer sérieusement à la conservation de ses États d’au delà des monts; heureusement pour elle, la rivalité des prétentions vint ranimer scs espérances. Les rois d’Espagne et de Naples faisaient marcher une armée dans le Milanais ; le roi de Sardaigne convoitait aussi ce duché, mais il craignait surtout que les Espagnols ne s’en emparassent; cette crainte le détermina à se jeter dans l'alliance de Marie-Thércse, espérant moins de scs propres droits que de la reconnaissance de cette princesse. La première opération des troupes autrichiennes fut la démolition des écluses conslruites par le gouvernement vénitien sur une petite rivière, qui, en sortant de l’Élat de Mantoue, se jette dans le territoire de la république. Les plaintes qu’on en fit porter à Vienne y furent reçues avec les ménagements qu’on avait droit d’attendre d’une cour qui avait un grand intérêt à ne pas s’attirer de nouveaux ennemis, et la négociation se termina parle prêt d’une somme assez considérable que la république fournit à la reine de Hongrie, dont les finances étaient alors fort au dessous de ses pressants besoins. Une armée d’observation de vingt-quatre mille hommes fut répartie sur la frontière occidentale de l’État vénitien, pour être spectatrice des coups que les Espagnols, alliés avec le duc de Modène, et les Allemands, secondés par le roi de Sardaigne, allaient se porter. Pendant les deux premières campagnes, les opérations ne furent point vives; le roi de Sardaigne agissait mollement, parce qu’il voulait obliger Marie-Thérèse à acheter sa coopération par des cessions importantes. En effet, l’inaction dans laquelle il persistait détermina la reine de Hongrie à lui abandonner la province de Vigevano, la partie do la province de I’avie qui est entre le Pô et le Tésin, Plaisance, la partie de ce duché qui s’étend entre la Nura et le Pô, enfin tous les droits que la maison d’Autriche prétendait avoir sur le marquisat de Finale, dont les Génois étaient en j possession. Quand il eut reçu le prix deson alliance,ce prince se mil en devoir de défendre les passages des Alpes HISTOIRE DE VENISE. —T. II. contre les armées françaises, qui se préparaient à pénétrer en Italie. Marie-Thérèse avait vu la Silésie conquise, Prague emportée d’assaut, et Vienne assiégée; elle était sur le point de perdre tous ses États d’Allemagne. Sa constance héroïque, le dévouement des Hongrois, les secours de l’Angleterre et de la Hollande, des traités qui interrompaient les hostilités de la Prusse et de la Saxe, ramenèrent la fortune sous ses drapeaux. Elle conquit à son (our la Bavière, chassa les Français de la Bohême, et les repoussa jusque sur le Rhin. Ces succès lui permirent de disposer de quelques corps, pour les envoyer au secours de ses Etats d’Italie; le territoire vénitien fut traversé par des troupes indisciplinées, dont on ne put ni empêcher, ni réparer les désordres. Le golfe fut couvert do bâtiments de guerre autrichiens et anglais, qui insultaient les côtes de la Pouille et désolaient le commerce de Naples, mais qui, en même temps, portaient journellement des atteintes au droit de souveraineté que la république s'était arrogé sur cette mer. Les troupes autrichiennes repoussèrent les Espagnols jusqu’aux frontières de Naples; elles furent à leur tour obligées de se replier, et ne s’arrêtèrent que dans la Romagne. Pendant ce temps-là, c’était en 1744, quarante-deux bataillons françrris avaienl forcé les passages des Alpes, et gagnaient, avec les Espagnols, une bataille sur les Piémonlais devant Coni. Les Génois, afin de n'être pas obligés de céder Finale au roi de Sardaigne, se déclarèrent contre lui. Leur port, ouvert aux troupes de France et d’Espagne, fournit le moyen de porter sans difficulté des Iroupes sur le revers des Alpes. L’armée du maréchal de Mailtebois descendit des Apennins, prit Tortone, Parme, Plaisance, força Alexandrie, Asti, Valence, Casai, conquit tout le Milanais, pénétra jusqu’à Lodi; et le 19 décembre 174S, l’infant don Philippe reçut le serment de fidélité de la ville de Milan. En Flandre, le maréchal deSaxe conquérait tout le pays depuis Louvain jusqu’à Anvers; et cette conquête, commencée par la bataille de Fontenoi, se terminait par la victoire de Raucoux. La campagne suivante, les Français et les Espagnols éprouvèrent l’inconstance de la fortune; les Autrichiens les repoussèrent jusqu’au pied des A Ipes; le roi de Sardaigne les battit à San-Lazaro ; Gênes, Savone, Finale, furent réduites à se rendre. Les Françaisavaient repassé leVar,ctlap!aced’Antibes était assiégée (1746). Une insurrection du peuple de Gênes délivra cette ville des Allemands, et les obligea de rassembler leurs forces, pour en entreprendre le siège. Cette circonstance, le gain de la bataille de Lawfcld sur 12