LIVRE XL. 519 Vérone. On y lit encore sur une des faces la date de 1 »27, qui est celle de sa construction. Il en environna ensuite cette ville, puis Padoue en 1559, et enfin la place de Candie fut revêtue d’une enceinte tracée d’après ce système. Ces inventions attestent des progrès dans les sciences mathématiques. En effet, la république de Venise comptait déjà plusieurs géomètres célèbres, notamment Jean Padouan de Vérone, Victor Fauste, qui, forcé par la misère à servir comme simple soldat, fut bientôt reconnu dans ces rangs obscurs pour un mathématicien, pour un helléniste célèbre, et ap-peléà une chaire dans l’université de Venise; Nicolas Tartaglia, de Brescia, le restaurateur des mathématiques parmi les modernes, qui, le premier, dit-on, donna une méthode pour résoudre les équations cubiques; dès le milieu du xvi6 siècle il avait présenté des vues dignes d’attention sur la théorie de la balistique. Ce ne fut que quelques années après que Galilée résolut rigoureusement le problème du mouvement des projectiles dans le vide. Enfin, l’archevêque de Spalato, Marc-Antoine de Dominis, est auteur du traité sur le rayon visuel et sur l’arc-en-ciel, auquel Newton a rendu le plus beau témoignage, en déclarant qu’il y avait puisé ses premières idées sur la théorie delà lumière. Dans un autre ordre de connaissances et d’observations, Gabriel Fallope, natif de Modène,mais professeur à Padoue, donnait son nom à ces trompes que le premier il avait observées dans les organes de la génération; et le frère Paul Sarpi, dont la gloire ne se bornait pas à celle de l’historien, du théologien, du géomètre et du philosophe, expliquait la théorie de la vision par la dilatation et la contraction de l’uvée oculaire, et découvrait le phénomène de la circulation du sang, si heureusement démontrée depuis par l’Anglais Harvey. Je trouve, dans l’histoire littéraire de Tiraboschi, à propos du philosophe François Patrizzi de Cherso, que ce savant avait indiqué manifestement dans un de ses ouvrages les sexes des plantes. VI. Beaucoup d’autres hommes recommanda-bles, sans avoir eu le bonheur d’attacher leur nom à une découverte, eurent le mérite de contribuer puissamment aux progrès de l'intelligence humaine. Outre les géomètres que j’ai déjà eu occasion de nommer, le siècle suivant vit fleurir Dorothée Alimari, que Pierre-Ie-Grand attira à sa cour, et qui donna une méthode pour le calcul des longitudes en pleine mer; François Bianchini, qui fonda à Vérone cette société savante connue sous le nom des Amis de la vérité. Divers genres de mérite attirèrent sur lui les bienfaits et la confiance de quatre papes. Il consacra les huit dernières années de sa vie à tracer la méridienne de l’Italie, grand travail dont Cassini lui avait donné l’exemple, mais qui ne lui avait été commandé que par son zèle. Après sa mort, les habitants de Vérone, ses compatriotes, firent ériger son buste dans leur cathédrale. 11 avait été le principal rédacteur delà commission chargée par Clément XI de la réforme du calendrier; ce qui' n’empêcha point les Vénitiens de faire toujours commencer l’annce au mois de mars, et même de conserver, dans leur administration maritime, l’usage d’un calendrier qui divisait l’année en onze . mois de trente-trois jours chacun. Louis Cornaro, le même qui est si connu par scs expériences et son livre sur la sobriété, publia, enlS60,des mémoiresd’hydrostatique fort estimés; et le bénédictin Benoît Castelli de Brescia se fit le plus grand honneurdans le monde savantpar sesdémon-strationssurla mesure des eaux courantes.Cagnoli, astronome de Vérone, s’est rendu reconimandable par un traité de trigonométrie que les ouvrages modernes n’ont point fait oublier. Corsali, son compatriote, est auteur d’une histoire de l’algèbre citée par M. Delambre comme l’une des productions les plus remarquables du xvme siècle. Lorgna, auteur de plusieurs écrits sur les mathématiques rationnelles et appliquées, a surtout le mérite d’être le fondateur de l’illustre société italienne. Parmi ceux qui appliquèrent la géométrie au calcul des révolutions célestes, il serait injuste d’oublier Horace Bergoino, de Brescia, et Jean-Antoine Magini, de Padoue, quoique ce dernier ait eu le tort de vouloir trouver, entre les mouvements des astres et la destinée des hommes, ces rapports que l’imagination humaine se plaît à supposer. Mais les préjugés de l’astrologie étaient une erreur du xvi° siècle. Magini ne fut peut-être pas moins redevable de sa renommée à ses prédictions qu’à ses démonstrations : ce qui n’empêche point qu’il n’aitété unsavant professeur;queVicence,Bologne, Padoue, ne se soient disputé l’avantage de l’entendre; et qu’il n’ait publié le premier d’utiles commentaires sur la géographie de Ptolémée, une trigonométrie sphérique, et la théorie des planètes d’après les observations de Copernic. Fracastor, illustre à tant de titres, et doué de cet esprit ferme qui n’admet que ce dont il peut se rendre raison, portait dans l’étude des sciences la méthode philosophique:astronome, il imaginait les calculs homocentriques pour démontrer le système planétaire; opticien, il essayait de combiner les verres à lunettes; cosinographe, il traçait déjà des caries des vastes contrées que les Espagnols et les Portugais venaient de découvrir ; physicien, il tentait, souvent avec succès, des routes nouvelles, et