LIVRE XVI. 233 LITRE XVI. GUERRE DANS LE MILANAIS. — MORT DE PHI LIPPE-MARIE VISCOKTI.—GUERRE DES VÉNITIENS CONTRE LES MILANAIS ET FRANÇOIS SFORCE.— l'AIX PAR LAQUELLE LA RÉPUBLIQUE ACQUIERT LA PROVINCE 1IE CRÈME. — REPRISE HE LA GUERRE CONTRE SFORCE. — IL EST COURONNÉDCC DE MILAN, 144 1 -1450.— GUERRE DES VÉNITIENS CONTRE SFORCE, DUC DE MILAN.—LES FRANÇAIS AUXILIAIRES DU DUC. — PACIFICATION GÉNÉRALE, LIGUE »’ITALIE, 1431-1454.— PRISE DE CONSTANT!NOPLE I'AR LES TURCS. — TRAITÉ ENTRE LA RÉPUBLIQUE ET MAHOMET II.—TRANSACTION AVEC LE PATRIARCHE d’aQUILÉE. — TRANSLATION DU SIÈGE PATRIARCAL DE GRADO A VENISE. — MALHEURS ET DÉPOSITION DU DOGE FRANÇOIS FOSCARI. — CRÉATION DES INQUISITEURS D’ETAT, 1433-1437. I. La lutte si inégale que François Sforce soutenait, devait avoir deux résultats, l’un et l’autre très-probables; la ruine de ce nouveau prince, et l’accroissement de la puissance d’Alphonse d’Arragon en Italie. Le duc de Milan avait mis de la passion à poursuivre son gendre, mais il n’avait pas intérêt de le perdre, et il en avait encore moins à laisser le roi de Naples s'ingérer dans les affaires de l’Italie supérieure : c’est ce que François Sforce lui fit représenter. Les Vénitiens joignirent leurs exhortations à ses prières, et le duc devint l’allié de son gendre et des quatre républiques, c’est-à-dire de Venise, de Gênes, de Florence et de Bologne. Celte alliance, signée le 24 septembre 1443, devait durer dix ans. Cesfréquentes variationsélaient un des caractères île la politique italienne. On se croyait fort habile, parce qu’on apercevait tout à coup de nouveaux rapports dans des affaires très-compliquées, et on pensait faire preuve de dextérité en changeant souvent de parti; dans le fait, on n’obéissait qu’à la crainte qu’inspirait un rival trop favorisé par la fortune, ou à l’espoir d’affaiblir tous ses voisins l’un par l’autre. Dans cette guerre, les Vénitiens ne furent qu'auxiliaires. Il ne s’agissait pas d’abord de leurs intérêts immédiats; il n’était question que de savoir si Sforce conserverait ses Etats dans la Homagne. Le peu de troupes que la république lui envoya ne l’avaient pas encore rejoint lorsqu’il remporta une victoire complète à Monteloro, le 10 novembre 1443, sur l’iccinino, son ancien rival, qui était devenu le général de l’armée du pape. L’année suivante, ce fut le fils de Plccinino qu’il cul à combattre, et ce nouveau général fui fait prisonnier. Le père en mourut de douleur. Ces deux victoires amenèrent une paix dont les Vénitiens furent les médiateurs. Le pape consentit à laisser à Sforce ce qu’il lui avait lui-même donné et ce que les armes de ce nouveau prince avaient conquis; mais dès l’année suivante, Philippc-Marie se brouilla encore avec son gendre. On vit une nouvelle ligue entre le pape, le roi de Naples et le duc de Milan. Le pape excommunia Sforce et scs alliés; les Vénitiens furent compris dans l’anathème. Ils le méritaient faiblement, car ils n’avaient fourni au seigneur de la Romagnc que de médiocres secours pour l’aider à défendre ses possessions, lis ne montrèrent quelque vigueur que lorsque le duc de Milan voulut reprendre le Crémonais qu’il avait donné en dot à sa fille, prétendant pouvoir convertir cette dot en une somme de cent mille ducats, qu’il offrait de déposer à Venise. La république répondit à cette proposition, qu’elle était garante du traité conclu entre le duc et son gendre, et qu’elle soutiendrait les droits de celle des deux parties contractantes au détriment de laquelle on essaierait de le violer. Cette contestation devint une guerre entre les Vénitiens et les Milanais, dont la province de Crémone fut le théâtre; mais dans celte campagne c’étaient les Milanais qui assiégeaient Crémone, devenue ville ennemie depuis qu’elle appartenait à Sforce: c’étaient les Vénitiens qui voulaient délivrer celte province, ils la convoitaient déjà depuis longtemps. Leur général, Michel Altendolo, parent de Sforre, cl qu’on surnommait Cotignola, du nom