LIVRE IL 19 l.ii. La guerre avail lieu enlrc les habitants des bords île lac de Garde et ceux de Vérone. Les Véronais demandèrent du secours aux Vénitiens. Il parait qu ceux-ci leur en fournirent, et leur facilitèrent dfs succès contre leurs ennemis; car Vérone envoya d| magnifiques présents à Venise. L’histoire du commerce de Venise attribue celte guerre à quelques contrariétés que les Véronais et l es \ énitiens éprouvaient pour le transport de leurs marchandises dans la vallée supérieure de l’Adige : on ajoute que tous les prisonniers faits dans celte i-Xj édition furent compris dans le partage des Vénitiens, et destinés à peupler l’île de Poveglia, alors dfcerte; ce qui autoriserait à penser que la république, après quatre cents ans d’existence, n’avait pa> encore une population suffisante pour couvrir son petit territoire. ^■V. Les peuples des côtes de l’Italie, toujours insultés par les pirates de la Méditerranée, n’ont jamais su les punir, ni même les repousser. A celte époque c'étaient les Sarrasins qui désolaient la l’ouillc, la Galabre, et les environs de Rome; ils s'é-taimil même établis dans la Sicile. Les Italiens iin-plofcront le secours de l’empereur grec Michel, qui à cet effet arma une Hotte. Mais cette llotle n’était pas suffisante pour attaquer les Sarrasins ; Theodose, qui la commandait, vint solliciter les Vénitiens de se joindre à lui. Le doge céda à cette demande et mil en mer soixante bâtiments, qu’il voulut commander en personne (837). Michel récompensa le dévouement de Tradenigo en lui donnant le titre de protospatairc, c’est-à-dire de grand écuyer de l’empire. Ceci constate encore la Suprématie que conservaient les empereurs d'O-rient. Les doges s'honoraient d’être revêtus d’une dc£grandcs dignités de la cour cl souvent les sollicitaient. Nous eu avons \ u plusieurs décorés du litre d’hjipate, c’est-à-dire de consul. ijH.a Qotle combinée rencontra l'ennemi devant (îroioue, dans le golfe de Tarentc. Le commandant de l'armée des Sarrasins se nommait Sahba. S’il faut en croire les historiens de Venise, la (lotte gri 'que plia dès le commencement de l’action et prit la fuite, de sorte que tout l’effort de l’ennemi tomba sous les Vénitiens. Presque tous leurs vaisseaux furent pris ou submergés; ce fut un désastre géi éral. Les débris de celle armée furent poursuivis paf les vainqueurs jusqu’à l’entrée du port. Une llolte marchande, qui revenait de Syrie, tomba enfre leurs mains, et tous ceux qui la montaient furtut impitoyablement massacrés. Les infidèles, maîtres de l’Adriatique, en ravagèrent tous les riva jos. \ cniseétait en alarmes. |jÎ les que les Sarrasins eurent quitté celle mer, les Narcntins, enhardis par la défaite des Vénitiens, recommencèrent leurs excursions, et vinrent piller la ville de Caorla. Le reste de la marine vénitienne fut envoyé contre eux et réussit à les contraindre de rentrer dans leur port. V. Ces malheurs publics avaient amené des divisions intestines. Six familles considérables étaient à la tète de plusieurs factions. D’un côté on voyait les Justiniani, les Polani, les liasi ; de l’autre, les Rarbolani, lesSelii et les Sevoli. Venise eut le déplorable spectacle de rixes continuelles et toujours sanglantes; le doge, qui n’eut pas la force de les réprimer, finit par en être victime. Un jour qu’il se rendait à l'église, accompagné de tout son cortège, il fut assailli par des furieux, qui appartenaient, dit-on, à la faction Rarbolani, cl massacré. Les gardes du doge firent d’inutiles efforts pour le défendre. Pressés parles conjurés, ils se réfugièrent dans le palais ducal, où ils soutinrent un siège de trente jours. Ils se rendirent enfin, sous la condition qu'ils auraient la vie sauve. Le peuple, revenu de son effroi, sentit toute l’énormité de l'attentat commis contre le chef de la république; on en poursuivit les auteurs : les uns s’exilèrent, d’autres furent mis à mort, et la famille des Rarbolani fut chassée de Venise.; mais, dans la suite, elle obtint son retour, parla protection de l’empereurd’Occi-dent. VI. Le trône ducal fut rempli en 804 par Urse I’articipatio, qui se montra le digne successeur du premier doge de son nom. Il se ligua avec l’empereur Charles le Chauve, pour repousser les Sarrasins, dont les armes faisaient de rapides progrès sur le continent. Mais il n’eut qu’une occasion d’essayer les siennes contre eux. Ils vinrent avec une flotte mettre le siège devant Crado. Le doge fit partir aussitôt la flotte vénitienne sous le commandant de son fils Jean. Les Sarrasins n’acceptèrent point le combat , se retirèrent, Grado fut délivré ; et Jean , de retour à Venise, fut associé au dogat, en récompense de cctteexpédilion. Le doge exécuta lui-même une entreprise heureuse contre les corsaires de la Dalinalie; mais ce qui lui fit encore plus d’honneur, ce fut d'avoir éteint les factions qui désolaient Venise, et d’avoir procuré à sa patrie dix-sept ans de prospérité. VII. Son fils Jean, qui lui était adjoint depuis longtempsj»lui succéda en 881. Il donna une marque d'ambition que Venise n’avait pas encore eue à reprocher à scs princes. Le comté de Comacchio, fief relevant du sainl-siége, était une espèce de principauté, qui lui parut un établissement convenable pour sa famille.N'osant en demanderau pape l'investiture pour lui-même, il la fit solliciter par son frère Radouer; mais le comte Marin, alors en I possession de Comacchio, averti de ce projet, enleva