LIVRE II. 27 préméditée. I.'Istrie est un pays pierreux, la Dal-inatie une langue de terre resserrée entre des montagnes et la mer ; mais la côte d’Italie qui longe l'Adriatique est malsaine, plate et par conséquent sans abri. Les navigateurs sont obliges de raser la côte opposée, où les canaux, qui séparent une multitude dit les, offrent des ports excellents; et toutes ces lies,pont le littoral, abondenten matériaux pour les constructions navales, en denrées; enfin la population de ces contrées est non-seulement belliqueuse, mais accoutumée à la mer. Ces avantages fout sertir l'importance de cette acquisition, surtout peur une puissance située au fond du golfe, et qui aspirait à devenir puissance maritime. Je me hâte de terminer l'histoire du règne d'Ur-seolo.B.a considération qu’il s'était si justement acquise lui fournit les moyens de rendre de nouveaux services à sa patrie. L’empereur Othon 111 voulut être le parrain de son (ils; cet empereur, ayant eu envie do voir Venise, y vint passer trois jours. Le doge profita de cette occasion pour obtenir de nouvelles franchises en faveur du commerce, cl une démarcation [dus favorable des limites de la république. WIV. 11 existait encore un usage, qui était sans doute un reste de l'ancienne dépendance de Venise à l’égard des empereurs d’Occident. Tous les ans la république leur envoyait un manteau de drap d’or. Othon devenu l’hôte des Vénitiens à leur insu, voulut bien abolir cette redevance à la prière du doge. Voici quelles furent les principales concessions obtenues par l’rseolo en faveur du commerce : Basile et Constantin confirmèrent par une bulle d’or tous les privilèges des Vénitiens dans l’Orient. L’empereur «'Occident, Otbon III, leur accorda non-seulement l'exemption de tousdroits dans l'étendue de son empire, mais leur permit la jouissance de trois Sorts dans le voisinage des lagunes. On croit que çcs trois ports étaient Trévise, Catnpallo, et Saintf.Michel-del-Quarto, voisin des ruines d’Altino et traversé par l'ancienne voie romaine Clautlia-Autjfcia, qui établissait la communication entre l'Italie et la Germanie. L’évequc de Céuéda accorda aux Vénitiens le port do Sellimo suFla Livcuza, et celui de Villono sur le Lamène. L’jvèque de Rellune avait montré d’abord des dispositions moins favorables; il avait même saisi les bit ns que les anciens habitants d’IIéraclée pos*-sentaient dans sou diocèse. Le doge fit cesser toute communication avec le Bellunois : ce territoire se trouva tout à coup privé de sel et de tout ce que lui fournissaient les lagunes. L’évéquc fut réduit à demander grâce, cl à restitue^ les biens qu’il avait séqufcslrés. Dans les loisirs de la paix Urscolo employa noblement sa fortune à relever des monuments publics. Son père avait fondé un hôpital et fait rebâtir, à ses frais, le palais et l’église de Saint-Marc : le fils fil reconstruire la métropole de Grado, d’autres disent même la ville, cl plusieurs édifices dans Iléraclée. Cette magnificence peut faire juger à quel degré de splendeur étaient parvenues les grandes familles ; celle-ci n’était élevée à la dignité ducale que depuis une génération. Urscolo était, sans contredit, le doge à qui scs services et sa gloire avaient donné le plus d’autorité. Il aurait pu, comme plusieurs autres, assurer sa dignité à son fils en se l’associant ; mais il s'abstint de cet acte peu populaire, et les Vénitiens surent lui en tenir compte, en prononçant solennellement cette adjonction. Ce fils qu’on lui donnait pour collègue venait d’épouser une nièce de llasllc et de Constantin, empereurs d’Orient. Ainsi la famille du doge île Venise s'alliait de deux côtés aux familles couronnées ; mais tant de félicités touchaient à leur terme. Ce fils qui devait lui succéder, cette belle-fille d’un sang royal, il allait les voir périr dans ses bras et de la maladie la plus affreuse. La peste cl la famine vinrent dévaster Venise. Le courage du doge eut encore cette déplorable occasion de s'illustrer; sa générosité, scs soins affectueux, l'activité de son administration, lui acquirent de nouveaux droits à une éternelle reconnaissance. Enfin Venise le perdit ; et comme s’il eût pu se croire encore redevable envers sa patrie, il affecta les deux tiers de son bien aux besoins de l’É-lat, n’en laissantquc le tiers à trois fils qui lui restaient et dont l’afné lui succéda en l’an 1006. XXV. Othon Urscolo était encore fort jeune, mais son nom lui concilia tous les suffrages. Il prenait les rênes d’un Etat dont son père avait étendu les limites. Cet accroissement de puissance donnait à la république de nouveaux rapports : elle allait se trouver en contact avec des voisins qui jusqu’alors lui avaient été à peu près inconnus. La Hongrie, cette contrée d’où tant de barbares étaient sortisau-trefois pour effrayer Venise, était alors gouvernée par un roi qui rechercha l’amitié du doge. Le mariage d'Othon avec la fille de ce roi cimenta cette alliance; et fournit une nouvelle preuve de la considération attachée à la dignité de doge et au nom d’Urscolo. On se rappelle quel’empcrcur d’Occident Othon 11, irrité contre Venise par la faction des Caloprini, avait défendu aux villes d’Italie toute communication avec la république.Capo-d’Argcre ou Cavarzéré, réduite à l’extrémité par le défaut de subsistances, s’était rendue à l’empereur, qui, pour encourager les défections, avait récompensé la soumission do