LIVRE VIII. LIVRE VIII. LEVÉE DE L’INTERDIT.— EXPÉDITION CONTRE LES GÉNOIS.— RÉVOLTE DE CANDIE.—GUERRE CONTRE LE SEIGNEUR DR VÉRONE.— ACQUISITION DE TRÉV1SE ET DE BASSANO, 1310-1343. — CnOlSADE DE SMYRNE.—SEPTIÈME RÉVOLTK DK ZARA.— PESTE A VENISE, 1343-1548.— NOUVELLE GUERRE CONTRE LES GÉNOIS, 1348-13154.— CHANGEMENTS SANS L’ORGANISATION DU CONSEIL DU DOGE. — ÉLECTION ET CONJURATION DE MARIN PALIER, 13Î5S-135!}. I. Après la mort de Pierre Gradenigo, on mit à sa place un vieillard de quatre-vingts ans, ce qui annonçait l’existence de plusieurs factions rivales qui se balançaient. Marin Giorgi n’occupa le trône que quelques mois; son règne ne fut signalé que par une entreprise infructueuse contre la ville de Zara, qui s’était révoltée pour la sixième fois, s’autorisant de la bulle par laquelle les sujets de la république étaient déliés de leur serment de fidélité (1310). Sous le règne de Jean Soranzo, successeur de Marin Giorgi, on entama une négociation avec les rebelles, et on les ramena dans le devoir par la persuasion (1311). Il était important de se réconcilier avec le pape, dont la malédiction avait de si dangereuses conséquences. Déjà la république lui avait envoyé des ambassadeurs qui n’avaient pu même être admis. Ou fit partir une seconde ambassade à la tête de laquelle était François Dandolo. Il se rendit à la cour de Clément V, et après avoir sollicité une audience, qui lui fut refusée, il se présenta tout à coup pendant que le pontife était à table, se jeta à ses pieds, demandant, avec beaucoup de larmes, la grâce des Vénitiens. On a écrit que l’ambassadeur, pour rendre cette action plus touchante, s’était revêtu des habits d’un suppliant, qu’il avait une corde au cou. Cela peut être; ces marques extérieures de soumission n’avaient rien de nouveau dans ce siècle, et avaient exalté dès longtemps l’orgueil de l’autorité pontificale. On ajoute que les cardinaux qui étaient présents oublièrent la charité chrétienne jusqu'à traiter Dandolo de chien, et que cet ambassadeur, prosterné aux pieds du vicaire de Jésus-Clirist, ne murmura point d’un si indigne outrage. La plupart des historiens racontent que Dandolo, ayant réussi dans sa négociation, devint l’objet de la reconnaissance publique, et que ce nom injurieux de chien, qui lui avait été donné par des prêtres insolents, devint un sobriquet honorable, parce qu’il attestait lesouveiiirqueconservaientscs concitoyens de l’important service qu’il avait rendu à sa patrie. Cette anecdote, peu digne de la gravité de l’histoire , est démentie par un auteur d’un grand poids, par le doge Foscarini qui démontre que plusieurs ancêtres de Dandolo avaient porté le surnom de Cane. Le pape, après avoir joui quelque temps de l’humiliation des Vénitiens, écouta leurs prières et leva l'excommunication. Une paix de douze ans succéda enfin à tant d’orages. Le commerce ramena l’abondance; on fit des travaux pour diriger les eaux de la Brenta, qui, en ensablant les lagunes, diminuaient la sûreté de Venise et la salubrité de l’air. L’arsenal dévasté par des incendies, épuisé par des guerres malheureuses, s’agrandit et reprit une nouvelle activité. Aussi, lorsqu’en 1324 quelques entreprises des Génois rallumèrent momentanément la guerre, vit-on quarante vaisseaux sortir du port et forcer, par une victoire, les négociants de l’éra à payer les frais de cette expédition. II. Cette époque fut celle d’une nouvelle révolte en Candie. Le gouverneur obtint quelques avantages assez signalés, sans cependant se rendre maître du chef des rebelles, l’our y parvenir, il lui écrivit en termes flatteurs, lui annonçant le projet de le réconcilier avec la république, lui faisant même entrevoir des récompenses, des honneurs.