HISTOIRE DE VENISE. lion ctait depuis longtemps abandonné; mais il n’est pas douteux que les Vénitiens n’en eussent connu et adopté l’usage; car l’empereur Léon, antérieur à Nicélas de trois cents ans, dit, dans sa Tactique, que, pour lancer cette matière, qui faisait explosion, leurs navires étaient armés de deux ou trois siphons à la poupe et à la proue.Un auteur sicilien qui a écrit la vie de Robert Guiscard, raconte que dans la bataille navale que le doge Dominique Silvio livra à ce prince devant Durazzo, en 1084, les Vénitiens firent usage d’un feu qui brûlait dans l’eau et qui s’attachait aux navires, au dessous de la flottaison ; ainsi l’emploi de cette arme terrible continuait encore à la fin du xie siècle, et avait cessé depuis longtemps au commencement du xiii0. Il y a des écrivains qui veulent que les Vénitiens aient fait usage delà poudre à canon avant les autres peuples de l’Europe ; il faudrait pour cela qu’ils l’eussent appris des Sarrasins, et ceux-ci de quelques peuples de l’Asie. Mais si d’aussi anciennes traditions sont nécessairement fort incertaines, il n’est pas douteux que les Vénitiens employèrent l'artillerie sur leurs vaisseaux , immédiatement après que cet art eut été découvert ou introduit en Europe, ce qui occasionna une révolution dans l’architecture navale elle-môme, et amena la construction à ce que nous voyons aujourd’hui. Les galères vénitiennes de moyenne grandeur portaient, vers la fin du xvi" siècle, quinze pièces d’artillerie, savoir : un canon de chasse de vingt-cinq livres de balle, deux de douze, six fauconneaux de deux, et six autres petites pièces appelées smerigli On voit les historiens turcs se plaindre de la supériorité que l’artillerie donnait à la marine vénitienne. XXX. Ces flottes, que montaient vingt, trente mille hommes, et quelquefois davantage, étaient toujours commandées par des nationaux. Le système du gouvernement était de confier ses armées de terre à des généraux étrangers, et de n’en admettre aucun dans sa marine. La jeune noblesse, élevée de bonne heure pour cette dernière destination, y trouvait des encouragements, de l’instruction, et des occasions de servir la patrie. Les trois principaux officiers de la marine vénitienne étaient : le généralissime de mer, chargé du commandement de l’armée navale, et revêtu d’une grande autorité sur toutes les colonies ; son pouvoir s’étendait jusqu’à condamner souverainement aux galères tous les individus non nobles qui lui étaient subordonnés, et même à faire mettre un patricien à la chaîne, en attendant qu’il fût jugé. Le prové-dileur de la flotte, dont l’emploi était biennal : ses fonctions consistaient dans l’administration des dépenses et la punition des officiers qui manquaient à leur devoir; on pouvait le considérer aussi comme un surveillant que le gouvernement plaçait auprès de l’amiral. Enfin le capitaine du golfe, c’est-à-dire le. général de l’escadre destinée spécialement à la garde et à la police de l’Adriatique. Le commandement des vaisseaux était toujours donné à des patriciens, même dans les grades inférieurs ; mais quand le perfectionnement de l’art de la navigation amena l’usage des vaisseaux de guerre, tels qu’on les construit aujourd’hui, le service des galères, devenu le moins utile, resta le plus favorisé, parce qu’il était le plus ancien. l’our s’assurer les moyens d’armer une flofle avec diligence, un règlement existait, qui déterminait le contingent de chacune des provinces qui composaient le domaine de la république. La capitale devait fournir des hommes pour l’ar- memenl de.........SO galères Les villes de la terre-ferme . 12 Capo d’Istria......2 L’Ile de Veglia.....2 L’Ile de Biazza.....2 Zara........2 Lesina........1 Spalato.......1 Trau........1 Cursola.......1 Cattaro . ......1 L’Ile de Candie.....10 Ainsi une flotte de quatre-ving cinq galères pouvait sortir en peu de temps des ports de la république, et dans les circonstances extraordinaires, on en armait souvent une plus grande quantité. Il y avait outre cela un nombre déterminé de galères dont la chiourme était composée de forçats. 11 paraît que quelquefois le commandement des galères armées dans les colonies, était confié à des nobles du pays. XXXI. Le matériel de la marine de Venise était conservé et entretenu dans un arsenal, qui fut longtemps l’admiration des étrangers. A l’entrée, deux énormes lions de marbre, conquis jadis au Pirée, attestaient que Venise avait succédé à Athènes dans l’empire des mers. Une forte muraille en formait l’enceinte ; trois bassins y recevaient les vaisseaux. L’administration de cet établissement était dirigée avec autant de soin que de magnificence. Des magistratures furent instituées pour y présider. La surveillance en fut confiée aux principaux fonctionnaires de la république ; le doge lui-même et son conseil étaient obligés d’y faire des inspections périodiques. La législation assurait avec la même prévoyance la conservation des bois de l’État, qui approvisionnaient cet établissement. Enfin des règlements de