572 HISTOIRE DE VENISE. des censures encourues, n’était pas ce qui coûtait le plus aux Vénitiens. Us se seraient estimés trop heureux que le pape se fût borné à des punitions de cette nature. Elles étaient assurément absurdes, car la république n’avait fait qu’une guerre juste. Elle s’était défendue, comme toutes les lois divines et humaines l’y autorisaient, mais elle n’avait pas été heureuse, et Jules II, en lui accordant son pardon, ne négligea point les intérêts temporels. L’absolution fut précédée d’un traité, dont les principaux articles étaient, que la république se désisterait de l’appel qu’elle avait interjeté lorsque le pape avait fulminé le monitoire contre elle ; que le gouvernement ne disposerait à l’avenir d’aucuns bénéfices, ceux de patronage laïque exceptés, et que les titulaires seraient mis en possession sans aucune difficulté, sur la seule présentation des provisions expédiées par la chancellerie romaine; que toutes les causes bénéficiâtes, ou appartenant à la juridiction ecclésiastique, pourraient être portées à la cour de Rome ; que la république ne pourrait soumettre les biens ecclésiastiques à aucune contribution. On voit combien les Vénitiens se relâchaient de leurs maximes relativement à la juridiction del'au-torité temporelle sur le clergé. Ce n’était pas tout. Us renonçaientà toutes prétentions sur les terres de l’Église. Ils reconnaissaient n’avoir aucun droit de s'immiscer dans les affaires que le pape pourrait avoir avec ses vassaux, promettant de ne donner à ceux-ci ni secours ni retraite. Ils s’engageaient à réparer les dommages que les églises avaient éprouvés pendant la guerre. Ils consentaient à ce que les grâces que les prédécesseurs de Jules II pouvaient avoir accordées à la république, fussent déclarées nulles de plein droit, etconsidérées comme non avenues, si elles étaient, en quelque chose, préjudiciables aux intérêts de la chambre apostolique. Enfin, et c’étaient ici les deux points qui avaient donné lieu aux plus pénibles discussions, la république renonçait au droit de tenir un vidame à Ferrare, et elle reconnaissait aux sujets de l’Église le droit de naviguer dans le golfe Adriatique, sans être assu-jétis à aucun péage , visite ou déclaration, ni pour leurs vaisseaux, ni pour leurs marchandises, quelle qu’en fût la nature ou l’origine, quand même elles appartiendraient à des étrangers.