JEAN HUNYADY. MATHIAS CORVIN. 231 conservé une certaine rancune. Mathias était d’ailleurs blessé que ce projet lui revînt par l'intermédiaire du roi de France. Quant au concile, il n’y avait nulle confiance; il n’en résulterait que des schismes etdes désordres. Peut-être se souvenait-il des tristes résultats du concile de Constance. Malheureusement ce n’était pas contre les Turcs que Mathias allait tourner ses armes; c’était contre ce même Podôbrad qui nourrissait ces rêves généreux. Catholique convaincu et tout dévoué au Saint-Siège, Mathias voyait dans les Hussites des ennemis aussi haïssables que les Musulmans. Le pape Pie II l’excitait à restaurer la foi catholique dans le royaume de Bohême; dans cette pieuse entreprise les rancunes et les convoitises du roi de Hongrie se conciliaient fort bien avec sa foi. Cette croisade anti-chrétienne fut retardée par diverses complications, par des querelles avec l’empereur, toujours empressé à intervenir dans les affaires intérieures de la Hongrie, par une révolte de la Transylvanie, irritée d’une augmentation d’impôts. Mathias étouffa la sédition; mais, voulant punir le voïevode Etienne de Moldavie qui soutenait les rebelles, il entreprit contre lui une expédition peu heureuse : il y fut blessé. En 1468, Mathias réunit les états de Hongrie à Eger (Erlau) pour préparer la lutte contre la Bohême, lutte fratri-cides’il en lut. « C’était, dit l’historien hongrois Boldenyi, la guerre la plus injuste et la plus stérile que Mathias pût entreprendre au point de vue des intérêts de la Hongrie. Quelle gloire, quels triomphes n’eussent pas assuré au monde chrétien l’alliance intime de la Bohême et de la Hongrie contre le Musulmans! La face de l’Europe orientale eût peut-être été changée. » Rien ne faisait mieux l’affaire du Turc et de l’Autrichien qu’une lutte entre les deux royaumes de saint Yacslav et de saint Etienne. La diète hongroise hésitait à se lancer dans cette aventure ; mais l’évêque de Vratislav (Breslau), le légat du pape, l’envoyé de l’empereur insistèrent auprès de Mathias Les Ottomans eux-mêmes offrirent une trêve de plusieurs années. La guerre fut résolue. « L’Église, écrivait le légat du pape, doit d’éternelles louanges au roi do Hongrie. »